Vendanges en Provence : pourquoi les vignerons récoltent le raisin au cœur de la nuit

«En général, on démarre à quatre heures du matin», nous raconte François Combard, à la tête du domaine Figuière, propriété emblématique des Côtes-de-Provence située à La Londe-les-Maures. Au château Paradis (AOP Coteaux d’Aix-en-Provence), le premier coup de sécateur est donné vers cinq heures du matin et les dernières grappes rejoignent la cuve avant midi. «C’est une course contre-la-montre», nous confie Jérémie Peckre, qui dirige l’exploitation. Il faut récolter les précieux grains avant que le soleil torride du Midi n’atteigne son zénith. «En Provence, vous ne verrez jamais un vigneron vendanger après 14 h», témoigne François Combard.

Aucune réglementation ne l’impose, pourtant la plupart des vignerons provençaux pratiquent les vendanges nocturnes. Pourquoi ? En plus de contribuer à la fraîcheur aromatique du vin, cela conditionne leurs futures ventes : pendant ces quelques heures, se joue le plus gros objectif de l’année.

«La couleur est devenue un véritable argument commercial»

«Mon grand-père disait que c’était un vin facile à boire, mais compliqué à faire», se souvient Jérémie Peckre. Voilà qui résume parfaitement le rosé, soit le vin le plus important pour les vignerons de Provence : celui-ci représente 90 % de la production de la région. Et pour qu’il soit au goût des consommateurs, les producteurs sont prêts à y laisser leur sommeil. En effet, c’est au cœur de la nuit que les raisins livrent le meilleur d’eux-mêmes. La fraîcheur nocturne préserve toute leur pureté aromatique : «Les arômes sont plus francs, plus fruités, plus nets», remarque François Combard. «En vendangeant de nuit, on évite l’oxydation et les macérations prématurées. On parvient ainsi à conserver les notes les plus fragiles des cépages : le cassis et la fraise des bois pour la syrah  et la rose pour le grenache , par exemple», illustre Jérémie Peckre. 

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Mais ce n’est pas tout. Cela permet aussi de contrôler la teinte du rosé, un aspect qui influence grandement le choix des consommateurs aujourd’hui. «La couleur est devenue un véritable argument commercial», confirme Jérémie Peckre. C’est précisément pour cela que cette étape est déterminante. Lorsqu’ils sont récoltés dans la fraîcheur de la nuit, les raisins ne risquent pas de s’abîmer avec la chaleur. Ils restent frais et intacts. «De cette manière, on évite la libération de jus, l’extraction de couleur et les rosés obtenus sont plus clairs», nous explique le directeur du château Paradis. C’est l’un des secrets des vignerons pour obtenir cette fameuse teinte rose pâle, désormais associée à un indice de qualité par les clients. Le rosé est le deuxième vin préféré des Français (à 87 % juste après le vin blanc, selon les données du baromètre Sowine), alors oui, le jeu en vaut la chandelle… quitte à la laisser brûler toute la nuit pour rester éveillé !