Un Avare de Molière au temps de la décroissance et de l'économie circulaire

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Vêtements donnés par le public pour habiller les comédiens, décors fabriqués à partir d’objets apportés… Clément Poirée revisite le classique de Molière. Jusqu’au 20 octobre.

Des vêtements donnés par le public pour habiller les comédiens, des décors fabriqués à partir d’objets apportés, le tout étant ensuite redistribué auprès d’associations solidaires: c’est le dispositif de la pièce de Molière, L’Avare, revisité par le metteur en scène Clément Poirée.

«Aujourd’hui, nous avons un kilt, une bouée, une casserole !», s’enthousiasme au micro un acteur, sur la scène du théâtre de La Tempête à Paris, lors d’une représentation à laquelle a pu assister une journaliste de l’AFP. Dans un joyeux brouhaha, les spectateurs, préalablement invités à vider leurs placards, déballent sacs et cabas afin de vêtir une troupe en petite tenue qui s’émerveille de chaque don. 

Tout au long de la pièce, costumiers et maquilleuses, discrètement postés sur le plateau entre bacs et portiques roulants, s’emploient à créer, pour Elise, Cléante, Mariane ou Frosine, des toilettes, parures et perruques certes décousues, mais en forme de clin d’œil au XVIIe siècle. «On a un squelette de spectacle. Et puis on attend les gens pour le nourrir», résume Clément Poirée, parlant d’un «Avare radin». «On est partis avec très peu de choses parce que c’était important pour nous de rendre vivante cette question: aujourd’hui, qu’est-ce que le don, la dépense? Qui est prêt à donner?». C’est «au cœur de la problématique de Molière», avec des «paradigmes (qui) ont beaucoup changé». «En fonction de ce qu’on a, la représentation va prendre une couleur différente», s’amuse-t-il. Une boîte à biscuits devient la fameuse cassette d’Harpagon, tandis qu’une théière, des peluches et des bibelots servent au banquet final. Subrepticement, des éclairagistes transforment des habits en appliques apposées à des projecteurs.

Échanges et découverte 

Selon Clément Poirée, ce que Molière met en lumière – «la captation des biens par une seule personne qui ne veut rien lâcher, rien laisser à ses propres enfants» – est «au cœur de ce qu’on traverse», dans une société devenue «société de possédants». Mais certaines répliques du dramaturge prennent un autre sens avec «les réflexions (actuelles) sur la décroissance, le réemploi, la mesure». Chaque soir, jusqu’au 20 octobre à Paris, les dons sont triés, stockés dans un conteneur avant d’être redistribués à une association travaillant dans le réemploi solidaire, la ressourcerie La petite Rockette (12e arrondissement). Delphine Terlizzi, coordinatrice générale, s’attend à recevoir «100 à 200 kilos de dons par représentation».

«Au-delà de la collecte, ce qui nous intéresse, ce sont les échanges entre deux univers et la découverte du théâtre», notamment pour les personnes en transition professionnelle au sein de son équipe, dit-elle. La troupe, elle, a été formée au tri et s’est fait prêter des vêtements pour les répétitions par l’association. Dans les villes de la tournée prévue ensuite (Avranches, Sartrouville, Vendôme, Maisons-Alfort, Nancy, Verdun…), les listes de ressourceries locales ont été données à chaque théâtre. Lors des premières représentations, des dons ont pu surprendre, comme une brouette ou un masque de François Bayrou. «Les gens ont été très généreux», selon le metteur en scène. Même ce soir où aucun pantalon n’avait été apporté, «c’était très drôle, on a dû inventer avec cette absence».



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