Tunisie – FMI : C’est quoi au juste les consultations au titre de l’article IV .

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Par Sadok Rouai

Lors d’un point de presse organisé le 7 décembre 2023([1]), le porte-parole du Fonds Monétaire International (FMI) a confirmé le report de la mission de consultation au titre de l’article IV pour l’année 2023, initialement prévue du 5 au 19 décembre, précisant que le report a été demandé par les autorités, ajoutant que « nous sommes prêts à mener les consultations au titre de l’article IV, et nous continuerons à soutenir les autorités dans leurs efforts de réforme. »

C’est quoi les consultations au titre de l’article IV ?

Il convient tout d’abord de préciser que le FMI remplit trois fonctions principales : (i) accorder des financements aux pays faisant face à des difficultés de balance des paiements, (ii) fournir une assistance technique pour aider les pays à mettre en œuvre des réformes, et (iii) garantir la stabilité du système monétaire international grâce à une surveillance bilatérale et multilatérale.

Les consultations au titre de l’article IV constituent l’outil principal de la surveillance bilatérale. Organisées en étroite collaboration avec le pays concerné, ces consultations sont minutieusement préparées en amont. Une équipe du FMI séjourne dans le pays pendant deux à trois semaines et mène des discussions principalement avec les représentants du gouvernement, mais aussi avec ceux du secteur privé, des syndicats et des organisations non gouvernementales ou universitaires.

L’objectif est de passer en revue la situation économique du pays et d’évaluer les perspectives et vulnérabilités à court et moyen termes. À la fin du séjour, la mission présente aux autorités ses conclusions préliminaires ainsi que ses recommandations. Un rapport préliminaire est remis aux autorités et un communiqué de presse est publié.

De retour à Washington, l’équipe rédige un rapport sur l’évolution récente de la situation économique et sur les politiques des autorités. Dans ce rapport, le personnel du FMI présente également son évaluation et ses recommandations. Ce rapport, complété par une déclaration du Directeur exécutif représentant le pays, est discuté au sein du conseil d’administration et un résumé des délibérations est publié, ainsi que le rapport lui-même.

A propos des retards dans la conclusion des consultations au titre de l’article IV 

Les consultations au titre de l’article IV représentent un exercice annuel obligatoire pour les 190 pays membres. Normalement, une consultation doit être finalisée par le conseil d’administration dans les douze mois suivant la conclusion de la consultation précédente, avec une période de grâce de trois mois. Pour les pays sous-programme, ces délais sont étendus à 24 mois, car le pays fait l’objet d’un suivi régulier par le conseil d’administration.

La plupart des consultations sont achevées dans les délais, et des retards de quelques mois sont tolérés pour assurer un déroulement adéquat des discussions. Cependant, il peut arriver que d’importants retards soient enregistrés pour des raisons politiques ou de sécurité ou suite à la demande des autorités ou parce que des négociations sur un programme sont en cours avec le FMI. Ces situations sont régies par une politique spécifique du FMI visant à inciter les pays à éviter les retards et, le cas échéant, à les stigmatiser en cas de délais excessifs. Voici les grandes lignes de cette politique :

– Lorsqu’une consultation n’est pas conclue dans les douze mois suivant la date limite prévue, le Directeur général informe l’État membre par écrit. La notification est adaptée à la situation du membre et rappelle, le cas échéant, son obligation de consulter.

– Le FMI publiera, à des intervalles n’excédant pas six mois, une liste de tous les membres pour lesquels la consultation n’a pas été achevée dans un délai de 18 mois à compter de la date limite prévue. Cette liste précise les raisons du retard pour chaque membre.

– Les services du FMI informeront de manière officieuse les administrateurs sur l’évolution et la politique économique de l’État membre.

Le cas de la Tunisie

 

Pour la Tunisie, la dernière consultation au titre de l’article IV a été conclue le 17 février 2021[2]. Depuis lors, les relations avec le FMI ont connu des hauts et des bas, culminant avec la conclusion, le 15 octobre 2022[3], d’un accord avec les services du FMI sur un financement pour un montant d’environ 1,9 milliard de dollars pour s’immobiliser par la suite à cause du refus de ce que Kaïs Saïed considère le diktat du FMI[4].

Le report de la consultation au titre de l’article IV demandé par les autorités constitue une fâcheuse décision et une première dans l’histoire des relations entre la Tunisie et le FMI et pourrait compliquer une éventuelle reprise des négociations sur un programme.

Le FMI rend public tous les six mois une liste des pays membres dont les retards dans la conclusion des consultations au titre de l’article IV excèdent 18 mois, en plus du délai normal de 15 mois. La dernière publication date de juin 2023 et inclut des pays confrontés à des retards pour des raisons politiques ou de sécurité (Venezuela, Syrie, Libye, Yémen, Ukraine, Biélorussie, et Mali), ou suite à une demande du pays (Iran). Il est à noter que des contacts ont été rétablis récemment avec la Libye, où une consultation au titre de l’article IV est programmée pour début 2024.

Une nouvelle liste des pays accusant des retards excessifs sera publiée au début de l’année 2024, et à moins d’un changement, la Tunisie y sera incluse. Ce développement regrettable risque d’être mal accueilli par le marché et par les pays donateurs. Les pays qui ont exprimé une flexibilité pour soutenir la Tunisie, même en dehors d’un programme avec le FMI, risquent maintenant de conditionner leur soutien à une reprise des relations avec le FMI dans le cadre des consultations au titre de l’article IV.

 

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