« On nous a bradés » : Boeing face à une grève massive de ses travailleurs, la première depuis 2008

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Nouvelle secousse pour Boeing : déjà dans la tourmente après plusieurs accidents, le groupe fait désormais face à sa première grande grève en 16 ans, avec le coup d’envoi vendredi d’un vaste mouvement social qui va bloquer sa production dans son berceau de la côte nord-ouest américaine.

La grève devait démarrer à minuit heure locale (9 heures en France), selon le syndicat des machinistes IAM-District 751, quelques heures après un vote massif par les salariés de Boeing de la région de Seattle en faveur d’un débrayage. Selon l’agence Bloomberg, des centaines de travailleurs ont entamé dans la nuit un piquet de grève à l’usine de Renton, proche de Seattle, où est produit le 737 Max, appareil vedette de l’avionneur américain.

96 % des travailleurs ont plébiscité la grève

Jeudi, les travailleurs ont rejeté la nouvelle convention de travail proposée par l’avionneur à 94,6 %, a précisé Jon Holden, président du syndicat des machinistes IAM-District 751. Ils ont en outre voté à 96 % en faveur d’une grève dès l’expiration jeudi à minuit de la convention actuelle, vieille de 16 ans. Les deux tiers des votes étaient nécessaires pour lancer un arrêt de travail.

Le syndicat, qui représente environ 33 000 travailleurs dans la région Nord-Ouest Pacifique, avait initialement soutenu l’accord, Jon Holden ayant même auparavant déclaré ne pas pouvoir « garantir que nous obtiendrons davantage en faisant grève ». Mais le vote massif des employés en a décidé autrement.

La grève doit entraîner la fermeture de deux grandes usines d’assemblage d’avions dans la région de Puget Sound. Elle va paralyser la production du 737, du 777 et du 767 cargo, dont les livraisons cumulent déjà les retards. Une situation d’autant plus problématique que l’avionneur encaisse la plus grosse partie du paiement (environ 60 %) à la remise des avions.

Boeing « prêt à retourner à la table des négociations »

En dépit du vote massif en faveur de la grève, le groupe Boeing a déclaré de son côté dans un communiqué être « engagé » dans la négociation. « Nous restons déterminés à rétablir nos relations avec nos employés et le syndicat, et nous sommes prêts à retourner à la table des négociations pour parvenir à un nouvel accord », a affirmé l’avionneur.

Le vote de jeudi marque un rejet décisif d’un accord qui, selon les travailleurs, était bien moins généreux que ne l’assuraient les dirigeants de Boeing. Il prévoyait une hausse salariale de 25 % sur quatre ans ainsi qu’un engagement d’investissements dans la région, ainsi que la construction du prochain avion – annoncé pour 2035 – dans le berceau historique de l’avionneur, ce qui devait assurer des emplois pour plusieurs décennies. Mais les mécontents jugent la hausse salariale trop éloignée des demandes du syndicat (+ 40 % initialement) et le volet sur les retraites insatisfaisant.

Certains estiment aussi que la présentation de Boeing était « trompeuse », comme Paul Janousek, un électricien d’Everett de 55 ans qui a voté en faveur de la grève. « Ils parlent d’une augmentation de 25 %, mais ce n’est pas le cas », a assuré cet employé embauché chez Boeing depuis 13 ans. Selon lui, son augmentation ne serait en réalité que d’environ 9 %, compte tenu de la suppression de la prime annuelle.

« On nous a bradés », a lancé jeudi Kamie Bryan, employée chez Boeing depuis 18 ans, fustigeant l’ampleur des « revenus du patron ». Boeing espérait quant à lui que ces concessions suffiraient à esquiver une grève.

« Une grève mettrait en péril notre reprise commune »

La dernière grève chez l’avionneur américain, qui remonte à 2008, avait duré à l’époque 57 jours. Le règlement de l’IAM prévoit que les grévistes reçoivent 250 dollars par semaine à partir de la troisième semaine d’arrêt de travail, soit au bout de 21 jours.

Selon les analystes de TD Cowen, une grève de 50 jours priverait Boeing de 3 à 3,5 milliards de dollars de liquidités et aurait un impact de 5,5 milliards sur le chiffre d’affaires. Dans les échanges électroniques avant l’ouverture de la Bourse de New York vendredi, le titre du constructeur chutait d’ailleurs de près de 4 %.

Autant de signaux inquiétants pour le groupe, dont la situation financière est précaire depuis le crash de deux 737 MAX 8 en 2018 et en 2019, ayant coûté la vie à 346 personnes. Sa réputation a aussi été ternie par une multitude de problèmes de qualité de la production ces derniers mois. Il fait notamment l’objet d’une supervision accrue après la perte d’une porte bouchon en plein vol début janvier sur un 737 MAX 9 d’Alaska Airlines.

VidéoLe constructeur Boeing est-il encore digne de confiance ?

« Ce n’est un secret pour personne : notre activité traverse une période difficile, en partie à cause de nos propres erreurs du passé. (…) Une grève mettrait en péril notre reprise commune », avait prévenu mercredi soir Kelly Ortberg, qui a succédé le 8 août à Dave Calhoun au poste de directeur général de l’avionneur américain. Il avait exhorté les employés à ne pas « sacrifier » les progrès futurs en raison de « frustrations liées au passé ».



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