Oléiculture en Tunisie : Ce «Chemlali» qui raconte une dextérité ancestrale | La Presse de Tunisie

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• Les variétés tunisiennes dont le Chemlali raflent les grands prix dans divers coins de la planète. Elles sont tolérantes à la sécheresse et résistent mieux aux changements climatiques.
• L’Institut de l’olivier a œuvré depuis 30 ans à améliorer tout ce qui est patrimoine génétique, en l’occurrence le Chemlali.
• Depuis 2017, cinq hybrides, c’est-à-dire cinq nouvelles variétés, ont été enregistrés. Ils ont en commun un parent, le Chemlali.
• Les plantations tunisiennes représentent 20 % de la superficie oléicole mondiale.

Nos ancêtres ont semé, planté et cultivé. Leur savoir-faire ancestral et leur dextérité surclassent aujourd’hui les laboratoires de recherche et instituts spécialisés. C’est grâce à eux que l’huile d’olive tunisienne est la plus prisée au monde. Même les géants de cette activité agricole qu’est l’oléiculture font recours au petit fruit noir de ces contrées pour adoucir et affiner leur huile d’olive. Les variétés tunisiennes dont le Chemlali raflent de surcroît les grands prix dans divers coins de la planète.

Pourtant, bon nombre d’agriculteurs tunisiens se tournent de plus en plus vers les variétés espagnoles, grecques et italiennes, motivés par l’entrée précoce en production de ces variétés (dès la 3e année après la plantation).

La Presse a approché l’Institut de l’olivier pour jeter la lumière sur le présent et l’avenir d’un produit de terroir qui vaut de l’or.

A la question de savoir pourquoi plusieurs agriculteurs tunisiens se tournent vers les variétés étrangères aux dépens des tunisiennes, le directeur général de l’Institut de l’olivier, Béchir Ben Rouina, répond : « Nous ne sommes pas contre les variétés étrangères, mais nous sommes contre leur prédominance. D’autant que nos variétés locales dont le Chemlali se sont distinguées par rapport au reste des variétés mondiales dans les différents concours internationaux ».

Dans la même optique, le chercheur précise que les variétés tunisiennes sont tolérantes à la sécheresse et résistent mieux aux changements climatiques.

L’Institut de l’olivier a œuvré depuis 30 ans à améliorer tout ce qui est patrimoine génétique, en l’occurrence Chemlali. C’est une variété qui a une huile extraordinaire. Elle est douce et est très prisée en Europe. Aujourd’hui, on l’exige comme géniteur pour l’amélioration génétique. Le taux d’acidité du Chemlali est inférieur au reste des variétés du Nord et Nord-ouest.

Variétés européennes peu adaptées aux conditions climatiques tunisiennes

Pour ce qui est des variétés étrangères dont l’arbequina, l’arbosana (espagnoles) et la koroneiki (variété grecque), l’universitaire souligne qu’elles ne sont pas adaptées aux conditions climatiques tunisiennes. C’est que la plupart de nos variétés, surtout celles du Centre et du Sud, tolèrent l’irrigation avec les eaux salées contenant de 3 à 6 grammes de sel par litre.

«Je ne dirai pas que les variétés étrangères ne sont pas bonnes. Mais si on veut se distinguer et exceller sur le plan international, on n’a qu’à miser sur nos variétés tunisiennes », fait remarquer notre interlocuteur.

Selon lui, l’autre variété cultivée dans le Nord-ouest tunisien qu’est le Chetoui  n’a pas beaucoup d’adeptes parce qu’elle produit une huile piquante.

«En Espagne, la variété la plus connue, c’est la variété piqual. Le mot est dérivé du français piquant. Cette huile est tellement astringente qu’elle n’est pas prisée. C’est pourquoi les Occidentaux préfèrent nos variétés dont l’huile est douce. D’ailleurs, ils prennent notre huile chemlali pour adoucir les leurs », explique le professeur-chercheur.

Amélioration génétique tuniso-tunisienne

Etablissement public créé en décembre 1981 et chargé d’entreprendre toutes les actions de recherche, d’étude et d’expérimentations de nature à développer et promouvoir le secteur oléicole, l’Institut de l’olivier  sis à Sfax œuvre à l’amélioration génétique.

«On a opéré des croisements dirigés comme {chemlali — chemchali Gafsa} et grâce à ce programme de longue haleine, on a obtenu des descendances qu’on a multipliées. Cela a abouti à l’enregistrement depuis 2017 de cinq hybrides, c’est-à-dire cinq nouvelles variétés qui ont en commun un parent le Chemlali. Ces nouvelles variétés se distinguent par leur contenu en acide oléique de l’ordre de 70%. En mars et avril derniers, on a demandé la mise en vente de ces variétés, mais malheureusement on a reçu des offres avec des prix dérisoires », se désole l’universitaire.

Cette amélioration génétique servira à faire face à l’engouement croissant des agriculteurs tunisiens aux variétés étrangères. Sachant que si les deux variétés d’olives indigènes chemlali et chetoui restent les plus cultivées, on observe depuis peu une augmentation des variétés européennes, telles que l’arbequina, l’arbosana, la coratina et la koroneiki.

La coratina prospère dans les plantations à haute densité, tandis que l’arbequina et la korneiki peuvent être cultivées à très haute densité.

Sensibilisation, le maillon faible

Les agriculteurs tunisiens sont majoritairement distants. Ils ne sollicitent les institutions et structures spécialisées qu’en cas d’urgence.

«C’est lorsqu’il se trouve bloqué que l’agriculteur sollicite nos services. A titre d’exemple, ils plantent des variétés européennes intolérantes au taux de salinité élevé puis ils viennent réclamer le dessèchement ou la mort de leurs plants, ignorant que les variétés grecques, italiennes et espagnoles ne tolèrent point un degré de salinité de 6 grammes par litre », fait savoir Ben Rouina.

Outre leur résistance à la sécheresse et aux maladies, les variétés tunisiennes Chetoui et Chemlali font preuve d’une remarquable flexibilité phénologique. Ce qui signifie qu’elles peuvent s’adapter à des conditions climatiques changeantes en ajustant le moment de la floraison et de la fructification.

Bon nombre de nos jeunes agriculteurs ignorent que les deux variétés sont également remarquablement résistantes aux maladies et aux ravageurs courants, qui sont par nature peu fréquents en raison du climat de la Tunisie. La combinaison de ces facteurs a fait de la Tunisie le plus grand producteur mondial d’huile d’olive extra vierge biologique.

C’est la raison pour laquelle il faut multiplier les campagnes de sensibilisation quant à la nécessité de miser sur les variétés locales en vue de promouvoir le secteur de l’oléiculture en Tunisie, en impliquant les médias et en privilégiant une communication multicanale.

La Tunisie est l’un des pays à avoir connu une transformation significative du secteur oléicole. Les plantations tunisiennes représentent 20 % de la superficie oléicole mondiale, et la Tunisie compte également parmi les plus importants producteurs avec une part de 6 %.

Le secteur génère 50 millions d’emplois journaliers tous les ans. Les exportations d’huile d’olive représentent 43% de l’ensemble des exportations agricoles et 10% des exportations globales. Ce qui en fait la cinquième source de devises pour le pays.

Les exportations d’huile d’olive représentent 70% de la production nationale et le pays compte plus de 1.600 huileries, 60 usines de conditionnement d’huile d’olive et 200 sociétés d’exportation de cette matière ainsi que 60 marques déposées.

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