« Occident, ennemi mondial n °1 » : les « néo-empires » face au modèle ambigu de l’Ouest

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Le titre du dernier ouvrage de Jean-François Colosimo est à double tranchant. Occident, ennemi mondial n1 (Albin Michel, 256 pages, 21,90 euros) est à la fois une charge attendue contre la coalition des « néo-empires » – Russie, Chine, Iran, Turquie, Inde – et une tentative érudite de définir ce que fut et ce que représente aujourd’hui l’« Occident », honni par ces nouvelles puissances. Au-delà d’une thèse largement partagée par intellectuels et géopoliticiens de l’« Ouest » – opposé au reste du monde –, l’auteur saisit l’occasion de pointer les dérives d’une « occidentalisation » à marche forcée du monde entamée à partir du XVIIIe siècle. « L’entité [l’Occident] ou ce qui en tient lieu, qu’ils [ses ennemis actuels] accablent, n’est pas sans taches et sans tares », affirme l’essayiste, qui dirige par ailleurs les éditions du Cerf.

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L’entreprise est ambitieuse, utile sans aucun doute, mais embrasse trop large, par moments desservie par une prose emphatique où point la colère. A l’appui de sa démonstration, M. Colosimo fait un détour par l’histoire longue de l’idée impériale, entraînant le lecteur dans un tourbillon d’époques et de lieux, de personnages tour à tour triomphants ou décadents, éclairés ou obscurantistes, russes, ottomans, perses, qings ou moghols. Sans oublier les empires européens, coloniaux et/ou esclavagistes, frappés par la « faillite de la mission civilisatrice dont ils se seront légitimés », et dont les politiques sont intimement liées à l’évolution des nouvelles puissances antagonistes. « A défaut d’avoir su les rendre impartiaux et effectifs, ne portons-nous pas une responsabilité dans le rejet des idéaux d’universalité, liberté, égalité, fraternité mêlés ? »

En réponse, M. Colosimo cite des auteurs européens du début du XXe siècle, décrivant, après l’« abyssale décivilisation de la Grande Guerre », le « déclin de l’Occident », blâmant son rapport frénétique à la technique, dépeignant un monde condamné, faute d’« imposer universellement le modèle démocratique et libéral anglo-saxon ».

De ratés historiques en tentatives d’occidentalisation autoritaire, l’auteur retrace donc les périodes troublées au cours desquelles les empires renaissants se sont inspirés de la puissance technologique ou militaire occidentale sans renoncer à une forme de despotisme. Le propos se concentre alors sur les conditions de l’émergence de ces « néo-empires », que l’auteur juge fondés sur « le conflit et la conquête ». A leur tête, constate-t-il avec amertume, règnent désormais des Poutine, Xi, Erdogan, Modi ou Khamenei, dont les prédécesseurs ont expérimenté avec plus ou moins de succès révolutions, européanisation, despotisme, modernisme, communisme, nationalisme ou internationalisme, avec ou sans Dieu. Il date cette « descente aux enfers » de la fin du XIXe siècle, période à laquelle « les autocrates ou les activistes orientaux qui prônent l’imitation de l’Occident sombrent peu à peu dans l’irréalité ».

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