«Nous avons toujours fait la promotion de la voile»: Gijon, la ville mutante du nord de l'Espagne qui accueille la 55e Solitaire du Figaro

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REPORTAGE – La course fait escale dans cette ville des Asturies au riche passé industriel. Une prospérité qui a laissé beaucoup de traces architecturales.

Envoyée spéciale à Gijón

« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. » Gijon pourrait adopter cette célèbre citation apocryphe d’Antoine Lavoisier comme devise, en ne gardant que la première et la troisième partie. Cette station balnéaire des Asturies, dans le nord-ouest de l’Espagne, n’a pas la notoriété d’Oviedo, la capitale de la région, ni celle de Santander, capitale de la Cantabrie, ou, plus loin sur la côte, de Saint-Sébastien, au Pays basque

C’est pourtant elle qui accueille la Solitaire du Figaro Paprec, dont les skippers sont attendus dès jeudi. Depuis 1991, sa première participation à la course, ce sera la onzième fois que la ville recevra les skippers dans son port de plaisance, la dernière remontant à 2017. «Nous aimerions accueillir la course plus souvent, d’autant que nous avons maintenant beaucoup d’expérience », dit Lorenzo Santos, chef des opérations au port de plaisance.

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Même enthousiasme du côté du Real Club Astur de Regatas, fondé en 1911. Leopoldo Vigil Pellon, son gérant depuis treize ans, confie sa « fascination pour ces hommes et ces femmes capables de naviguer en solitaire, même si ce n’est pas le tour du monde ». Natif de Gijon, cet amoureux de la montagne et skieur alpin évite de monter sur un bateau : il a le mal de mer, qui se manifeste aussi lorsqu’il prend le téléphérique pour aller skier ! Mais nulle incompatibilité entre sa passion et son rôle au Real Club. Il est d’ailleurs heureux de la forte demande pour intégrer l’école de voile créée en 1992 par le Real Club. 

«Nous avons toujours fait la promotion de la voile et presque tous les bateaux qui naviguent à Gijon sont membres du club. Mais nous sommes limités par l’espace. Comme nous disposons de 40 bateaux, nous ne pouvons pas former plus de 60 ou 70 enfants.» Du côté du port, Lorenzo Santos souligne toutefois que, «contrairement à Santander, où sa baie protégée permet de naviguer 200 jours dans l’année, à Gijon la marée est plus compliquée, ce qui explique un goût pour la voile peut-être moins prononcé que celui des Français, nombreux à venir jusqu’à nous ». Les Français sont en effet les plus présents après les touristes espagnols du centre et du sud du pays à visiter la ville, qui bénéficie d’atouts particuliers.

Inspirée par le modernisme catalan

La plage de San Lorenzo, longue de 1,5 km, est sans conteste son grand luxe. Mais Gijon dispose d’un patrimoine architectural qui mérite de s’éloigner de la mer, omniprésente, le temps d’une promenade. Bien sûr, les années 1960 et 1970 se sont insérées dans l’histoire, lui donnant « un aspect chaotique du point de vue urbanistique », concède Inmaculada Olay Uria, chargée de la promotion et de la commercialisation à l’office du tourisme, tout en précisant qu’« en ayant été capitale de la région, elle a concentré toutes les administrations et reste une ville monumentale ».

Cette grandeur, Gijon la doit aussi à un homme : Gaspar Melchor de Jovellanos (1744-1811), l’un des principaux représentants du siècle des Lumières espagnol et « le “baron Haussmann” de Gijon, à une échelle plus modeste », précise notre accompagnatrice. Visionnaire, libéral et très européen avant l’heure, il a contribué à transformer ce qui était au départ un village de pêcheurs en véritable centre industriel, attirant une population grandissante pour travailler dans ces usines. Prospère, la ville a ensuite vu fleurir des constructions inspirées par le modernisme catalan et Antoni Gaudi, d’autres d’un pur style Art nouveau et Art déco. Et il faut croire que l’ingéniosité de Jovellanos a infusé l’esprit des Gijonais, car ils ont su transformer leurs bâtiments les plus emblématiques pour qu’ils continuent de vivre.

La statue de La Madre del emigrante pointe du doigt l’Atlantique.
Picasa

Ainsi en va-t-il du Théâtre Arango. Cessant de donner des représentations en 1999, il a été récupéré par une clinique esthétique avant de devenir un Burger King en 2019. Si la transmutation n’a pas été du goût des acteurs culturels, on constate que lustres, balcons ornés et orchestre surélevé ont été préservés. Le contraste entre la majesté du lieu et la qualité gastronomique est un attrait à lui seul. De même, certains services de la mairie bénéficient de cadres de travail atypique : une pêcherie, le Foyer maternel et infantile dans un immeuble résolument rationaliste, et l’office du tourisme installé dans ce qui fut l’imposante maison d’un navigateur face au port de plaisance. Du côté de la plage San Lorenzo, on remarque même que la chapelle du même nom abrite désormais un magasin de vêtements !

Températures clémentes

Il est loin le temps où la ville bruissait du retour de la pêche sur la péninsule de Cimavilla. Aujourd’hui, la zone est essentiellement résidentielle, habitée par une population relativement jeune qui fréquente les très nombreux restaurants qui tapissent les petites places. Dans ce quartier aussi, on remanie pour ne pas détruire. Un couvent devenu usine de tabac est en rénovation et tout le monde penche pour qu’il accueille des activités culturelles. Une précédente expérience a été couronnée de succès à l’extérieur de la ville avec l’Universidad Laboral. Ce centre d’apprentissage pour les orphelins, qui s’étale sur 270.000m2, ce qui en fait l’un des plus grands bâtiments à usage civil d’Espagne, accueille depuis 2007 plusieurs institutions culturelles.

Même le bord de mer a fait sa mue. Parmi les neuf plages de Gijon, celle du Poniente, non loin du port, qui a vu la reine Isabelle la Catholique s’y baigner, a été utilisée pour des activités industrielles avant de redevenir une plage… artificielle, conçue pour ne jamais être recouverte par la mer. Tout près, au milieu d’immeubles en forme de paquebots inversés, une cheminée de brique esseulée trône sur une vaste zone vide qu’on devine autrefois bouillonnante d’activités. L’aquarium, ouvert en 2006, a naturellement trouvé sa place près de ce bord de mer qu’on ne quitte jamais vraiment à Gijon.

« Avec le changement climatique, le tourisme se développe dans le nord de l’Espagne », remarque Noemi Pariente Fernandez, responsable de la communication et du marketing à l’office du tourisme. Températures plus clémentes, gastronomie de caractère et une nature verdoyante : l’alliance se veut gagnante. De plus les statues de l’empereur romain « Octavio Augusto » ou de La Madre del emigrante, le long de la plage de San Lorenzo, ont beau pointer du doigt l’Atlantique, et la sculpture d’Eduardo Chillida Éloge de l’horizon, recueillir et enfermer le bruit des vagues en haut de la colline de Santa Catalina, le visiteur trouve également l’évasion dans la nature à seulement quarante minutes du centre. 

Non sans avoir admiré avant le superbe Retable de la mer, de Sebastian Miranda, à la maison natale de Jovellanos, qui célèbre l’activité de la criée à Gijon. Sont présentes une copie en plâtre de l’original, partiellement détruit pendant la guerre civile, et la seconde version, en bois, que le sculpteur a achevée en 1972 à 87 ans. Rien ne se perd, tout se crée et tout se transforme, faudrait-il dire.


Carnet de route

Y aller

Vueling assure des vols directs entre Paris Orly et l’aéroport des Asturies, à 42 km de Gijon, le jeudi et le samedi. Pour les autres jours, correspondance par Barcelone. Vueling.com

Séjourner

El Môderne. Dans un immeuble gris et imposant des années 1930, cet hôtel 4 étoiles séduit par son emplacement près du centre et de la plage. Sa décoration résolument urbaine oscille entre des tonalités de gris et de noir très élégants. À son agencement rectiligne répond un mobilier épuré aux formes arrondies. Il dispose de 47 chambres, dont 26 junior suites, et son personnel est délicatement attentionné. À partir de 90 €. Tél. : + 34 984 08 08 09 ; elmodernehotel.com/

Numa Hotel Boutique. Ouvert en 2021, cet autre 4-étoiles en plein centre de Gijon dissimule sa modernité derrière une façade de briques blanches, rescapée d’une rénovation de deux anciens immeubles d’habitation. Avantage non négligeable, il bénéficie de son propre parking. Le contraste entre les espaces communs nimbés d’obscurité propice au chuchotement et la belle luminosité des chambres enrobées de blanc pour rappeler la proximité de la plage en font un lieu apaisant. Dotée de fauteuils confortables, la salle du petit déjeuner invite à s’y poser le reste de la journée. Sont disponibles 35 chambres sur 8 étages, chaque niveau disposant d’un demi-étage. À partir de 90 €. Tél. : +34 985 09 00 99 ; numahotelboutique.com- hotel.com/fr/

Se restaurer

El Feudo. Depuis 2001, ce restaurant du centre accueille dans un décor moderne pour une cuisine typiquement asturienne sur laquelle le chef Hernan Moran a apposé sa marque. Le burger McFeudo avec sa côte de veau en est un bon exemple. La cave regorge de nombreuses références nationales et internationales. Comptez 45 €. Tél. : +34 985 35 16 59 ; elfeudogijon.com

La Galana. Sur la Plaza Mayor, cette cidrerie cumule tous les atouts : un décor de bois splendide et une cuisine raffinée, le maintien des traditions et l’adaptation aux nouveaux goûts. Bien sûr, on y sert le cidre bras tendu au-dessus de la tête, rendant le breuvage aérien. Grand choix de tapas et des plats classiques, avec mention spéciale pour le nombre de variations autour du thon. Autour de 35 €. Tél. : +34 985 172 429 ; restaurantasturianolagalana.es

Mamaguaja. Sous les arcades de Marques de San Esteban, ce restaurant offre aussi une vue sur le port de plaisance. Déco verdoyante inspirée des forêts des Asturies. Carte de produits de la mer et de la terre. La possibilité de picorer ou de manger au bar peut s’avérer commode en cas d’affluence. Comptez 60 €. Tél. : +34 984 081 116 ; mamaguaja.com

À noter, la possibilité d’acheter auprès de l’office du tourisme un Menu Gijon Gourmet, qui permet d’apprécier à moindre coût de bons restaurants de la ville, dont l’étoilé Auga.

Se renseigner

www.visitagijon.es


Fête de la voile et du cidre

L’escale à Gijon de la 55e Solitaire du Figaro ne pouvait pas tomber mieux. Jusqu’au 1er septembre a lieu la 33e Fête du cidre naturel. Une institution dans cette région où la pomme est reine et où la consommation du cidre se veut autant une tradition qu’un art de vivre. Et un service qui relève presque de la performance artistique. Dans toutes les cidreries, le serveur lève la bouteille de cidre en tendant le bras et en positionnant le verre au niveau de son genou. Son regard se détache alors du contenant pour verser le contenu. La « cascade » et surtout sa chute permettent de libérer le gaz. Une formation très sérieuse est nécessaire pour maîtriser le geste et des concours couronnent les meilleurs.



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