Notre critique de Tatami : la politique sur le tapis

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Inspiré d’un fait réel, le combat passionnant d’une judokate iranienne qui refuse de céder aux pressions de son pays.

Dans l’autocar, il n’y a que des femmes voilées. Ce sont des athlètes. Elles sont des judokates iraniennes. Direction Tbilissi où se déroule le championnat du monde. Le foulard s’accorde-t-il avec le kimono? Là-dessus, les experts se perdent en conjectures. Leila compte bien rapporter une médaille d’or de Géorgie. Elle est là pour ça. Elle gagne, combat après combat. Un problème surgit: il est grave. Elle risque d’affronter une rivale israélienne. Il n’en est pas question. Les autorités de son pays lui intiment de renoncer. Elle n’a qu’à tricher, simuler une blessure. Refus obstiné de l’intéressée. Déclarer forfait? Vous n’y pensez pas. Elle ne mange pas de ce pain-là. Cela n’arrange pas Maryam, son entraîneuse, qui voit s’abattre sur elle une escadrille de représailles. Les deux femmes s’opposent. De rage, la jeune s’éclate le front contre un miroir. Les points de suture tiendront-ils?

Jeanne d’Arc avec une ceinture noire

Ça n’est pas le seul suspense qui sous-tend ce film d’une fougue, d’une intensité, d’une intelligence qui vous envoient au tapis. À Téhéran, la famille avec laquelle elle communique par WhatsApp s’affole. Elle n’en démord. Ce cas de conscience la dévore de l’intérieur. Le protocole s’en mêle. Les officiels fulminent. La peur s’installe. La menace rôde. La coach tergiverse, se décompose. Il ne s’agit pas de lâcheté. C’est autre chose. Les enjeux sont différents. Le chantage a de multiples facettes. Deux générations se percutent. Un émissaire du gouvernement est dépêché sur place. Leila se dresse, résiste, ôte son foulard à la face du monde. Dans ses écouteurs, du rap retentit.

L’actrice Arienne Mandi est cette boule de nerfs, un concentré de rébellion. Cette brune piquante a un regard d’acier. Elle est Jeanne d’Arc avec une ceinture noire. Le rêve est à ce prix. La liberté se paie de défis. Tatami, comme Raging Bull a été tourné dans un noir et blanc cendreux. Les ralentis ne sont pas rares. Cet anti-Rocky (quoique) traînera tous les cœurs après lui. Le courage est à l’honneur. Il est terriblement photogénique.

La comédienne Arienne Mandi dans «Tatami».
Metropolitan Film

Tiré d’un épisode réel, ce film à la rigueur quasi-documentaire fait preuve d’une belle intelligence. Il aborde la politique par un biais inattendu. Cela lui donne une force peu commune. Comme le public des compétitions, le spectateur sera enthousiaste. L’audace se conjugue au son des randori, des uchi-mata, ce vocabulaire qui claque ici comme un cri de révolte. Derrière la caméra, la comédienne franco-iranienne des Nuits de Mashad, Zar Amir Ebrahimi (elle incarne ici Maryam) et le réalisateur israélien Guy Nattiv sont à la hauteur de leur sujet. Ils remportent la victoire haut la main. Eux aussi méritent bien une médaille. Un vent nouveau souffle, là-bas, quelque part du côté de l’ancienne Perse. Telle est la leçon qu’apporte ce long-métrage qui a l’air simple comme l’enfance de l’art martial et qui vous saute à la gorge. Ippon!

«Tatami». Drame de Zar Amir Ebrahimi et Guy Nattiv. Avec Arienne Mandi, Zar Amir Ebrahimi, Ash Goldeh. Durée: 1 h 43

L’avis du Figaro: 3/4.



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