Ministre de l’Économie, un poste à refuser à tout prix ?

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FIGAROVOX/TRIBUNE – Face à l’état désastreux des finances publiques, les marges de manœuvre du futur locataire de Bercy apparaissent restreintes, analysent l’économiste Sébastien Laye et le journaliste Jean-Baptiste Giraud. Le temps est pourtant venu de libéraliser l’économie française, estiment-ils.

Sébastien Laye est entrepreneur et économiste. Jean-Baptiste Giraud est journaliste et auteur de Dernière crise avant l’Apocalypse (Éditions Ring, 2021).


La réforme économique serait-elle devenue le lit de Procuste de toutes les ambitions françaises, en l’espace de quelques semaines ? La conjonction d’un gouvernement aux mains liées, et d’un budget en dérapage totalement incontrôlé, relègue toute ambition de réforme aux calendes grecques.

Et pourtant : le déficit budgétaire 2023 a été sous-estimé dans des proportions inédites, laissant soupçonner un doute sérieux sur la sincérité des comptes présentés par Bruno Le Maire. Ceux de 2024 sont a priori dans le même état. Comment, dans ces conditions, alors que d’aucuns réclament une hausse des impôts d’un côté, et la suppression d’une partie des aides aux entreprises de l’autre, envisager réformer profondément le pays, et sauver puis relancer la croissance ? 

Si personne ne se bouscule pour aller à Bercy chez Les Républicains – à l’inverse des ministères régaliens – c’est que le putatif ministre de l’Économie prend le risque de n’être qu’un comptable, dont le rôle se limitera à prendre des coups, voire, à servir de bouc émissaire demain… L’inventivité n’est donc pas la vertu cardinale exigée pour le poste. Plutôt la rigueur, et la capacité à discuter avec les forces politiques et les marchés financiers.

Mais cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a rien à faire sur le plan économique, tant s’en faut. Si l’on met de côté un instant le sujet principal – la répartition des dépenses au sein du budget, et la réduction de la dépense publique -, on peut dégager un triptyque de réformes à périmètre budgétaire constant (qui pourrait même indirectement aider l’objectif de contrôle de la dépense publique) : simplification, déréglementation, privatisations.


Ce n’est pas le rôle de l’État de fabriquer des voitures, d’opérer des lignes aériennes ou d’organiser des jeux de loterie. France Télévisions ou la Banque Postale n’ont plus rien à faire dans le périmètre d’un État en grande difficultéfinancière…

Sébastien Laye et Jean-Baptiste Giraud

Sur le sujet de la simplification administrative (qui coûte 3% de PIB chaque année à l’économie française, dont au moins dix milliards rien que pour les collectivités publiques), Gabriel Attal a lancé un modeste effort début avril. Reste à espérer que la nouvelle assemblée approuvera ces projets laissés en suspens par le gouvernement démissionnaire.

Du côté de la dématérialisation, avec pour commencer, la chasse aux CERFA inutiles, l’utilisation poussée de l’IA dans la gestion administrative documentaire, il y a des gisements considérables de croissance à trouver. Le Sénat, dont certains membres sont pressentis au gouvernement, recommande dans un rapport un toilettage de notre droit, notamment en matière d’urbanisme ou de l’environnement. Soyons clairs : budgétairement, tout ceci ne coûterait rien, mais ferait gagner des millions d’heures d’activité aujourd’hui non productives, non créatrices de valeur, à des milliers d’entreprises de toutes tailles, et bien entendu aux fonctionnaires eux-mêmes.

Il en va de même de l’indispensable déréglementation de notre économie. Une déréglementation similaire à celle initiée par un certain Donald Trump en 2017, et dont tous les économistes sérieux conviennent qu’elle est une des clefs du miracle économique américain de ces dernières années. Le paquebot America traverse les tempêtes comme s’il s’agissait d’un petit grain, car ses turbines tournent à pleine puissance, bien huilées, sans grains de sable dans les rouages ni poids morts à traîner. L’économiste devenu président Javier Milei est en train d’accomplir la même chose en Argentine, et les effets libéralisateurs sur l’économie brésilienne sont époustouflants, en quelques mois. 

Ajoutons que sur quelques secteurs jouissant d’une position monolithique bloquant les consommateurs, insuffler plus de libertés en simplifiant encore plus la portabilité des contrats (comme chez les opérateurs mobiles et Internet, et dans une moindre mesure chez les assureurs) dégagerait de nouvelles pistes de croissance, mais aussi des gains de pouvoir d’achat immédiats. Plus de concurrence, si besoin est garantie par la loi, cela signifie des prix plus bas pour le consommateur. Michel Barnier tient là la meilleure piste pour mettre le sujet de l’inflation derrière nous.

Enfin, il faut relancer le chantier des privatisations. L’État, directement, ou via la BPI, est encore trop présent dans l’économie, sans qu’il n’y ait de raisons stratégiques à la clef. Il est au capital de 1.750 entreprises françaises ou multinationales, sans que l’on ne comprenne ce qu’il y fait exactement ! Ce n’est pas le rôle de l’État de fabriquer des voitures, d’opérer des lignes aériennes ou d’organiser des jeux de loterie. Cette politique colbertiste arrive à son terme. France Télévisions ou la Banque postale n’ont plus rien à faire dans le périmètre d’un État en grande difficulté financière… L’exemple le plus probant de la fin de ces temps révolus est celui de la Nasa. Space X réalise avec dix fois moins d’argent et dix fois plus vite ce que l’agence spatiale américaine n’arrive plus à faire, ni non plus Boeing, qui est devenu un État en miniature. La libération de l’économie, c’est maintenant !



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