Maylis de Kerangal : « J’ai laissé plus de place que d’habitude à la part rêveuse de mon écriture »

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« Jour de ressac », de Maylis de Kerangal, Verticales, 256 p., 21 €, numérique 15 €.

L’idéal, se disait-on avant de rencontrer Maylis de Kerangal, serait de lui donner rendez-vous au Havre. On déambulerait avec elle dans les rues de la ville portuaire dont elle fait un personnage à part entière de son nouveau roman, Jour de ressac. Ses livres précédents avaient tous exigé un véritable travail de terrain et de précises recherches ­documentaires. Elle aimerait certainement nous montrer la façon dont les lieux ont nourri son écriture.

La déception de n’avoir pu ­concilier les emplois du temps pour réaliser ce projet est vite oubliée lorsqu’on la retrouve, finalement, dans un café parisien. Et que, s’appuyant sur l’image de la skyline du Havre ornant la couverture de l’ouvrage, l’écrivaine nous fait remarquer qu’on ne sait pas immédiatement s’il s’agit « d’une photo ou d’une peinture ». Du réel ou de sa représentation. Dans Jour de ressac, l’enjeu était justement, dit la romancière, de réussir à se tenir « dans cet entre-deux », et de faire émerger le « paysage intérieur » que constitue pour elle Le Havre, où elle a passé son enfance et son adolescence. Pour mieux laisser la forme de cette ville, presque entièrement détruite en 1944 par les bombardements alliés, et reconstruite selon les plans de l’architecte Auguste Perret, « infuser » dans l’esprit du lecteur. « Un paysage, dit-elle, c’est quelque chose qui pourrait subsister une fois qu’on a fermé les yeux. Le travail de l’écriture, c’est d’agencer des histoires, des situations, des personnages, dans un bain très organique qui est celui du langage, pour donner la sensation de cette expérience-là. »

Oublions donc la visite de la ville. Et ne comptons pas sur Maylis de Kerangal pour nous livrer des anecdotes sur les lieux interlopes qu’elle a peut-être fréquentés lorsqu’elle y vivait. Peu encline à s’attarder sur les détails de sa biographie, l’écrivaine, née à Toulon en 1967, n’hésite pas, en revanche, à laisser vagabonder sa pensée au gré des hypothèses qu’on lui propose. Elle préfère se dévoiler en réfléchissant à voix haute. Révélant, à travers ses hésitations, son exigence de précision, et l’attention sincère qu’elle prête à son interlocuteur, sa tournure d’esprit et sa sensibilité plutôt que ce qui pourrait les avoir déterminées.

Coïncidences

Chacun des livres qu’elle a publiés depuis vingt-quatre ans, remarque l’écrivaine, « fait signe » à la ville normande. Mais c’est la première fois que cette dernière devient une véritable « matrice de rêverie ». « Dans ce livre-là, j’ai l’impression que j’ai laissé plus de place que d’habitude à la part rêveuse de mon écriture », glisse l’autrice de Naissance d’un pont (Verticales, 2010) au détour d’une question qu’on lui pose sur les coïncidences qui rythment Jour de ressac.

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