Les châteaux allemands luttent contre le dérèglement climatique qui menace leurs parcs

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Champignons, parasites, stress hydrique… Les forêts des domaines historiques sont de plus en plus fragilisées et voient des sujets centenaires disparaître.

Dans le parc de Bad Muskau, en Saxe (est de l’Allemagne), une tige de frêne pousse dans le creux du tronc d’un de ses aînés centenaires, ravagé par les parasites avant de s’effondrer lors d’une tempête. Cet évènement témoigne des conséquences du changement climatique sur les arbres anciens, mais c’est aussi une solution pour les parcs historiques allemands pour restaurer leurs forêts.

Sur le domaine de Muskau, l’un des plus grands espaces paysagers d’Europe centrale, classé au patrimoine mondial de l’Unesco, on se fie à une méthode ancestrale et durable pour repeupler la forêt: la «régénération naturelle».

Reconstituer 99 % des arbres avec leur ADN

Les jardiniers sélectionnent les meilleures graines des arbres endémiques pour remplacer les anciens, sans manipulation génétique ni aide extérieure. Ainsi, Jana Kretschmer a planté une tige de frêne dans un tronc vieux de 150 ans «car il profitera des racines de l’ancien arbre et résistera mieux aux menaces», explique la jardinière.

Manque d’eau dans le sol, sécheresse, propagation de nuisibles: elle connaît tout du mal silencieux qui ronge ses «vieux camarades». «Je suis frustrée de voir que, chaque année, on doit abattre davantage d’arbres», regrette celle qui est aussi responsable adjointe du parc, situé à cheval sur l’Allemagne et la Pologne.

Beaucoup de sujets datent de l’époque du prince Hermann von Pückler-Muskau, paysagiste qui a créé le domaine au début du XIXe siècle sur le modèle des parcs anglais, avec un château et de nombreuses dépendances. L’an passé 180 anciens hêtres, frênes ou chênes ont disparu sur l’espace de plus de 550 hectares, «une catastrophe» qui morcelle les paysages et affecte l’écosystème.

Avec la «régénération naturelle», le parc espère à terme reconstituer 99% des arbres voués à disparaître. En transmettant leur ADN, les vieilles branches enseignent à leur descendance comment s’adapter à un climat de moins en moins hospitalier. «La nature nous montre le chemin, les humains n’ont qu’à ouvrir les yeux», sourit Jana Kretschmer.

Il serait aussi possible d’importer des espèces étrangères, plus résistantes, mais «ce ne serait ni durable ni intelligent», estime Cord Panning, directeur du parc de Muskau. D’autant que la «régénération naturelle» permet des économies d’argent et d’eau.

À Bad Muskau, un duo d’espèces invasives, l’amadouvier et le scolyte, dévaste les arbres de l’intérieur. D’étranges excroissances couvrent les écorces, des stigmates voire des trous béants marquent les troncs. «En général, quand on s’en rend compte, il est trop tard pour sauver l’arbre», explique Jana Kretschmer. En parallèle, les épisodes de sécheresse de 2018 à 2020 ont affaibli considérablement les ancêtres.

20 à 30 % du budget annuel consacré 

À Munich, au château de Nymphembourg, des invasions de phytophtora (un champignon) et de gui privent les arbres d’eau. «Les arbres se retrouvent dans un état de stress sec, même les années où les précipitations sont suffisantes», assure Michael Degle, architecte paysagiste du parc.

Un projet de «gestion durable des arbres» existe depuis 2018, basé sur des capteurs hydriques et de nouvelles techniques d’élagage. «Nous essayons de générer un système aussi stable que possible, qui s’accommode mieux à la chaleur et à la rareté de l’eau», explique Vera Wesinger, architecte paysagiste auprès de l’administration des châteaux de Bavière.

Depuis 2021, Bad Muskau et Nymphemburg collaborent avec une dizaine d’autres dans un groupe de travail dédié à l’adaptation des sites au changement climatique. «Nous atteignons nos limites», avertit leur étude publiée en juin. Car 20 à 30% de leur budget annuel est consacré à la réparation des dommages climatiques, une proportion qui augmente. D’après leurs calculs, il faudrait investir 200 à 250 millions d’euros sur le long terme pour adapter les principaux jardins historiques.

Fin septembre, pour une journée nationale dédiée au changement climatique, le site de Bad Muskau organisera une visite guidée pour montrer les dégâts causés dans le parc. L’occasion pour Jana Kretschmer d’expliquer à petits et grands que «les arbres ne sont pas des morceaux de bois, mais des êtres vivants bien plus futés que nous».

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