Le festival Heiva, fragile rempart contre la disparition de la langue tahitienne

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« Ha’aviti, e ha’amata tatou ! » (« Dépêchez-vous, c’est bientôt à nous ! »), presse une cheffe de troupe dans les coulisses de la place To’ata, sur le front de mer de Papeete. Plus de 120 danseurs s’apprêtent à déferler sur scène, dans les costumes végétaux qu’ils ont patiemment confectionnés la nuit précédente.

Ils sont 2 500 à participer au concours de chants et de danses traditionnels du Heiva i Tahiti, le grand festival tahitien qui a lieu tous les ans en juillet, au rythme des pahu et des fa’atete, les percussions polynésiennes. D’autres pratiquent les tu’aro ma’ohi, des sports traditionnels, comme le lever de pierre, le lancer de javelot ou la course de porteurs de fruits. D’autres encore s’impliquent dans le Heiva Rima’i, la fête des artisans. Mais le concours de chants et de danses est bien le temps fort du Heiva : des mois de répétitions pour trois semaines de fête. Elle permet aux Polynésiens de replonger dans leurs racines culturelles… et dans leur langue, de moins en moins parlée.

« Selon le recensement de la population de 2017, environ 70 % des Polynésiens déclarent parler une langue polynésienne, mais il y a un décalage important entre compétence déclarée et pratique, analyse Jacques Vernaudon, maître de conférences en sciences du langage à l’université de la Polynésie française. La langue la plus utilisée en famille est une langue polynésienne pour seulement 22 % d’entre eux, et ce taux s’effondre à 15 % chez les 20-29 ans », déplore-t-il.

Identité polynésienne

Parmi les jeunes, les meilleurs locuteurs sont les protestants : ils apprennent le tahitien à l’école du dimanche, des cours organisés par les paroisses. Pour les autres, le Heiva est souvent le dernier espace de pratique.

« On a des danseuses qui ne parlent pas du tout tahitien. On les voit se taper du coude pour avoir la traduction quand le chef parle en tahitien, remarque Namouré Punua, une comptable de 46 ans, chorégraphe du groupe Tamarii Mataiea. En cinq mois de répétitions, on voit deux changements : elles perdent du poids et elles progressent en tahitien ! » Heiarii Mahiti, un danseur de 35 ans, se félicite : « Dans notre groupe, on a quatre popa’a [Blancs] : en cinq mois de répétitions, ils ont appris les bases du tahitien, sans aucun cours. » « Avec nous, le chef de troupe ne parle qu’en tahitien et, comme la plupart des danseurs ne le parlent pas, il faut leur traduire, mais ça les fait progresser », renchérit Vaekehu Hokaupoko, une danseuse marquisienne, qui assure que « pour danser, il faut comprendre les paroles ».

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