La guerre en Ukraine révèle les ambiguïtés de la neutralité suisse

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Est-ce un « rapprochement rampant » avec l’OTAN, comme le dénonce avec constance le premier parti de Suisse, l’Union démocratique du centre (UDC), nationaliste et souverainiste, qui enrage de voir la neutralité helvétique prendre un tour plus pragmatique ? N’y a-t-il, au contraire, rien de nouveau, comme fait mine de le jurer la ministre de la défense centriste, Viola Amherd, principale cible du courroux du premier cité en raison de ses relations fréquentes et détendues avec les hauts représentants de l’Alliance atlantique ?

A la mi-août, un rapport d’experts indépendants, mandaté par la ministre, envisageait une « coopération accrue » avec l’organisation militaire occidentale, sans exclure que des soldats suisses puissent participer à l’avenir à des exercices militaires conjoints à l’extérieur de leurs frontières.

Encore impensable il y a quelques mois, la seule évocation d’une telle perspective indique que les choses sont en train de bouger en Suisse et que l’interprétation rigoriste de la neutralité adoptée jusqu’à récemment a peut-être vécu. L’UDC elle-même ne s’y trompe pas, pressentant qu’un danger imminent pèse sur ce statut mythifié d’Etat non aligné depuis 1815.

Dénonçant les rares accommodements pratiqués avec le texte d’origine et son esprit, le parti d’extrême droite a déposé en avril à la chancellerie fédérale les 132 000 signatures d’une initiative populaire exigeant une « neutralité intégrale » sur laquelle les Suisses devront voter dans les deux ans. Le fait que cette formation politique abrite en son sein des personnalités ouvertement prorusses n’est pas étranger à ce raidissement.

Duplicité passive avec le Kremlin

Depuis que l’invasion de l’Ukraine par les forces russes, en février 2022, a bouleversé l’ordre sécuritaire du Vieux Continent, la Suisse ne sort plus de ce débat identitaire, qui la contraint à d’incessantes explications auprès de ses principaux partenaires occidentaux. Ces contorsions ont valu au pays des tombereaux de critiques.

Celle de duplicité passive avec le Kremlin, quand Berne interdit à l’Allemagne de transférer à l’armée ukrainienne des équipements que l’industrie de l’armement helvétique lui a vendus des décennies auparavant. Celle encore de cynisme sous la coopération apparente, quand la Suisse reprend les sanctions de l’Union européenne (UE) contre la Russie, mais les applique avec un degré de motivation discutable, par exemple dans la recherche des fonds russes des oligarques affidés au régime de Poutine. Des 150 milliards de dollars (135 milliards d’euros) « au minimum » estimés par l’Association suisse des banquiers elle-même (qui n’a aucune raison d’exagérer leur importance), seuls 7 milliards de dollars ont été bloqués. Le reste a largement eu le temps de trouver le chemin de Dubaï pendant que le sujet finissait par disparaître du radar de l’actualité, et que les pressions extérieures diminuaient.

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