La drle de campagne

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L’Isie a choisi la voie de la force. Mais, cela, nous l’avions déjà remarqué lorsqu’elle avait décidé d’ignorer superbement les décisions – pourtant juridiquement supérieures – du tribunal administratif. A moins de trois semaines de la présidentielle, l’instance de Bouasker prouve qu’elle ne changera pas d’avis et que le scrutin se déroulera comme ELLE l’aura décidé. Face aux injonctions répétées du tribunal administratif, l’Instance électorale se contente d’un simple : « trop tard, nous avons déjà imprimé les bulletins de vote ». Comment faire demi-tour ?

Farouk Bouasker lui-même se charge de vérifier que ces bulletins aient bien été acheminés aux premiers bureaux de vote. Circulez, il n’y a (plus) rien à voir !

 

Le processus électoral avait déjà très mal commencé lorsque plusieurs candidats – relativement sérieux – ont été jetés en prison ou malmenés à cause d’anciennes accusations ou d’affaires ne requérant aucune peine d’emprisonnement. Ceux qui avaient encore des doutes, les verront totalement dissipés : rien ne changera dans ce scrutin. Il se déroulera exactement de la même manière qu’il avait commencé.

 

En attendant, plusieurs candidats légalement remis en course par le tribunal administratif, mais déboutés par l’Isie, ont décidé de faire campagne et d’exposer leurs programmes. Curieusement, ces non-candidats ont été les plus expressifs et les plus actifs de la campagne. Certainement car ils n’avaient plus rien à perdre.

Une manière pour eux de dire, malgré tout, que même s’il n’y a plus d’espoir qu’ils réintègrent la course, ils ont tout de même décidé d’exprimer leur indignation et d’afficher leurs programmes.

 

Mais, la présidentielle de 2024 ne sera pas une élection de programmes. Les électeurs accorderont sans doute peu d’intérêt aux promesses électorales pour la santé, l’éducation, le transport… aux grands projets dont on promet la réalisation ou aux chiffres brandis pour faire rêver à un avenir meilleur. Les électeurs ne se demanderont pas qui, parmi cette farandole de candidats, les représentera le mieux, leur ressemblera le plus, ou est le plus porteur de leurs valeurs et principes. Pas de vote utile, pas de vote sanction cette année. Pas de vote de gauche, ni de droite. Pas de vote conservateur, islamiste, ni progressiste. La vie politique telle que nous l’avions connue, ces dernières années, n’existe plus vraiment aujourd’hui.

Les électeurs tunisiens auront à décider parmi les seuls trois noms qu’on leur a consenti sur un bulletin de vote. Ils auront à décider dans un climat de tensions et de méfiance.

 

Le manifeste du président-candidat Kaïs Saïed publié dimanche a donné le ton de la campagne. On avait d’abord cru à un communiqué fabriqué de toutes pièces par ses partisans, tant les menaces étaient montées d’un cran. Ceux qui s’étaient exprimé en son nom et avaient fait campagne pour lui en 2019. On avait cru qu’il ne s’encombrerait pas à faire campagne, certain de ses chances de se faire réélire. Son manifeste du 15 septembre prouve que ce n’est visiblement pas le cas.

Alors que les Tunisiens attendaient les vœux d’apaisement de leur président à l’occasion du Mouled, ils ont eu, à la place, les menaces du candidat. « Sang qui coule », « fer et feu », « ennemis », « noirceur qui règne », « corrompus », « criminels », « terrorisme », « assassinats », « blanchiment d’argent », « voix propagandistes et vendues », « voleurs de l’argent du peuple », « assainissement du pays » …. Voilà comment le président mène sa campagne en 2024. Il n’ s’agit, en effet, plus d’une campagne mais d’une véritable « guerre de libération » (sic).

Celui qui avait clamé que, pour sa campagne de 2019, il a simplement dû débourser cinquante dinars et l’addition d’un café, met beaucoup plus de moyens pour passer cette fois-ci. Oui, car celui qui candidate en 2024, n’est plus celui qui a été élu en 2019.

 

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir quel crédit accorder à la présidentielle du 6 octobre ? Faut-il aller voter, au risque de cautionner un scrutin sur lequel planent de nombreux doutes ? Faut-il utiliser le boycott comme outil d’expression de toutes ces voix qui n’ont pas été prises en compte ? Le choix revient-il encore au peuple ? 

 

 





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