L'œil de l'INA : Jean Piat, de Lagardère aux Rois maudits

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Le grand comédien français aurait eu cent ans le 23 septembre. Madelen nous propose de voir ou de revoir ses magnifiques interprétations des héros de Paul Féval et Maurice Druon.

Il aurait eu cent ans cette semaine et rêvait de les fêter. La maladie l’a emporté au lendemain de ses 93 printemps Jusqu’à ses ultimes apparitions à la scène ou à la télévision , Jean Piat est néanmoins demeuré l’exemple à suivre de l’éternelle jeunesse. À l’aube de son 90e anniversaire, il a affiché complet en jouant chaque soir, Vous avez quel âge, un seul en scène signé Françoise Dorin. Face à un jeunisme dont il percevait l’impact de plus en plus fort, il expliquait qu’il ne fallait pas négliger pour autant les atouts que représentent la maturation et l’expérience de la vie. À 24 ans, il avait triomphé dans « Cyrano » à la Comédie Française et 50 ans après, quand il avait repris le rôle, il avait éprouvé le sentiment de le dominer enfin ! 

Madelen vous propose de découvrir ou de redécouvrir quelques-unes de ses confidences sous la forme d’un journal intime extrait du magazine culturel Le Café Picouly diffusé en 2010. Je ne suis pas un aventurier de la femme, expliquait alors cet inconditionnel de l’œuvre de Sacha Guitry, en guise de clin d’œil à un public majoritairement féminin qu’il n’a cessé de séduire. Ce soir-là, il évoque, en filigranes, un parcours qui l’a conduit de l’exclusion du Conservatoire pour indiscipline à la Comédie-Française où il a passé 25 ans, avant de prendre le risque de démissionner. Certains ont alors assuré que sa carrière était terminée. Il a démontré le contraire en étant quasiment présent en permanence sur les scènes parisiennes des salles privées, ou en tournée pendant plus de trois décennies . 

Peu présent au cinéma, sans doute par manque de temps, il a, en revanche, marqué l’histoire du petit écran des années 60/70 . Il est à l’origine d’un accord, en coulisses, entre la Maison de Molière et l’ORTF qui a permis la diffusion d’une série de pièces classiques dans Au théâtre de ce soir . Il a surtout marqué l’antenne en devenant la tête d’affiche de deux feuilletons que l’on n’appelait pas encore des mini-séries. 

En 1967, sur la première chaîne encore en noir et blanc, il incarne le chevalier de Lagardère, dans une adaptation du roman de Paul Féval, Le bossu, et de quelques-unes des suites de cette histoire, imaginées par Paul Féval fils. Jean-Pierre Decourt réalise les six épisodes de 50 minutes écrits par Marcel Jullian, inconditionnel des romans de cape et d’épée. Le tournage n’a physiquement pas été de tout repos. À des cours d’escrime qui lui ont permis de découvrir les secrets de la botte de Nevers ,se sont ajoutées de longues journées en pleine campagne, en particulier sur des chemins abandonnés, où il fallait parfois accéder en grimpant des marches taillées dans le roc. Les prises de vues se déroulant en décor naturel, il était hors de question que le moindre poteau télégraphique apparaisse à l’image. 

En 1971, Jean Piat relève un autre défi. Il devient le comte Robert d’Artois dans l’adaptation en six épisodes de 102 minutes des sept volumes de la série de romans de Maurice Druon Les Rois maudits. Les dialogues sont confiés à Marcel Jullian, tandis que Claude Barma est chargé d’assurer la réalisation de l’ensemble Aux yeux des dirigeants de l’ORTF, ce projet est considéré comme le symbole d’une évolution dans les programmes, le développement d’une télévision populaire, mais culturelle, prestigieuse et de qualité. Des moyens financiers et techniques exceptionnels ont été alloués pour de longs tournages dans les studios des Buttes-Chaumont. Chaque épisode a été répété pendant trois semaines ,avant une dizaine de jours d’enregistrement en vidéo et en couleurs . Le choix de privilégier les intrigues aux scènes spectaculaires a été jugé comme un risque que Barma et Jullian ont assumé. Ils ne l’ont jamais regretté. 

Le succès d’audience a donné une nouvelle jeunesse à Maurice Druon et relancé l’œuvre originale qui s’est retrouvée dans le classement des meilleures ventes de livres. Sortis ensuite en cassettes puis en DVD, Les Rois maudits ont touché une nouvelle génération et pas seulement en France. Au début des années 90, le romancier américain George Martin s’est largement inspiré de cette fresque pour écrire une saga, Le trône de fer, adaptée sous la forme d’une série télévisée par HBO sous le titre Game of Thrones. Ce que Maurice Druon, Marcel Jullian, Claude Barma et Jean Piat n’auraient sans doute jamais osé imaginer. 



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