Ismaïl Kadaré, le grand écrivain albanais, est mort à 88 ans

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C’est son premier roman, Le Général de l’armée morte – paru en 1963 en Albanie et sept ans plus tard en France chez Albin Michel – qui lui avait apporté la renommée, faisant de lui, instantanément, l’un des rares écrivains albanais connus internationalement. Traduit dans plus de 45 langues et lauréat des plus grands prix littéraires (Man Booker, Prince des Asturies, Jerusalem Prize), l’écrivain Ismaïl Kadaré est mort à Tirana, lundi 1er juillet, à l’âge de 88 ans.

Il est né le 28 janvier 1936 à Gjirokastër, une ville située à 200 kilomètres de Tirana, dans le sud montagneux de l’Albanie. Inscrite au patrimoine de l’Unesco – elle était connue sous l’empire byzantin sous le nom d’Argyropolis, la « ville d’argent » – cette cité historique joue un rôle important dans son œuvre. Kadaré la décrit notamment dans Chronique de la ville de pierre (Hachette, 1973) ou encore dans son magnifique récit autobiographique La Poupée (Fayard, 2015). Dans sa vie comme dans ses récits, Kadaré revenait toujours à Gjirokastër, « la ville la plus penchée d’Europe », la seule où l’on pouvait « accrocher son chapeau à la pointe d’un minaret ».

Lire aussi (2015) : Article réservé à nos abonnés « La Poupée » : Ismail Kadaré en terre maternelle

Eternels soupçons d’ambiguïté

Mais Gjirokastër est aussi le lieu de naissance du dictateur albanais Enver Hodja (1908-1985). Ce qui était bien sûr le hasard, mais Kadaré trouvait qu’on l’y ramenait un peu trop souvent – à Hodja, à la dictature, à l’histoire politique de son pays. Qu’on le sommait de s’expliquer sur la façon dont il avait pu ruser ou composer avec le régime – un communisme dont il avait connu à peu près toutes les versions, russe, chinoise puis complètement autarcique. Rencontré par Le Monde en 2001, il ne cachait pas sa lassitude d’avoir à repousser toujours les éternels soupçons d’ambiguïté le concernant lorsqu’on lui parlait de l’Albanie. « Ça me dégoûte d’employer tant d’énergie à parler de cela. Au fond, ce qu’on me demande, c’est pourquoi je suis sorti vivant du système ? Mais on pouvait être fusillé pour des choses minuscules, pourquoi aurait-il fallu que je me sacrifie ? Les donneurs de leçons me disent : “Vous n’avez pas été sincère avec les dictateurs.” Mais faut-il être sincère avec des bandits, des fauves ? »

Sa sincérité, disait-il, c’est à l’égard de son art qu’elle s’exerçait. La littérature en effet, l’accompagnait depuis un âge précoce. A 9 ans, alors le communisme s’installait dans son pays, il était déjà « obsédé par l’idée de percer le sens des mots ». A 12, il écrivit ses premiers vers. Après des études à l’université de lettres de Tirana, il fut envoyé à Moscou, à l’institut Maxime-Gorki – qu’il évoque dans Le Crépuscule des dieux de la steppe (Fayard, 1981) –, une institution spécialisée dans la création littéraire où l’on envoie, à l’époque, tous les jeunes de sa trempe, ceux qui font partie des « troupes d’élite du réalisme socialiste ».

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