« Il faut imaginer ici des loups, des cerfs, des lapins, des braconniers partout » : à la découverte du parc de Versailles avec l’historien Grégory Quenet

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Il suffit de passer la grille de la Reine, au nord du château de Versailles, pour s’offrir une virée à la campagne. La plaine de la Fontaine aux crapauds, une vaste étendue plane jaunie sous le ciel de juillet, sent bon le foin coupé. « D’habitude, il y a même des moutons ici. Ils ont sans doute été rentrés pour l’été », remarque Grégory Quenet, historien de l’environnement à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines et auteur de Versailles, une histoire naturelle (La Découverte, 2015).

Il n’y a que quelques centaines de mètres entre les premiers arpents du parc bucolique, dont l’entrée est gratuite, et les dorures du palais voulu par Louis XIV, l’un des monuments les plus visités du monde, avec près de sept millions de touristes par an. Ici, pourtant, sous les tilleuls argentés de l’allée de la Reine qui bruissent au vent du matin, on se compte. Quelques parents charriant poussettes et tricycles, deux cavalières dont les montures broutent et une poignée de visiteurs ahanant pour dégager du passage leur voiturette électrique en panne dans l’allée Saint-Antoine.

« Ici, c’est le parc des Versaillais, pas celui des touristes », lance Grégory Quenet, en short et baskets, qui a choisi, pour l’arpenter, le vélo, un « compromis » entre la marche à pied et le cheval, jadis mode de transport de la Cour. Car il fallait alors en fouler, des lieues, pour atteindre les limites du domaine ! N’en demeure que ce qui constituait le Petit Parc, soit 450 hectares, que longe aujourd’hui, à l’ouest, la route départementale reliant les communes de Saint-Cyr-l’Ecole et de Bailly.

L’historien Grégory Quenet, à Versailles, le 11 juillet 2024.

Mais retournons à la fin du XVIIe siècle, quand le château est habité, et imaginons le Grand Parc, qui s’étend sur 11 000 hectares, soit plus que la superficie actuelle de Paris intra-muros, ceint d’un mur de 40 kilomètres de longueur, enfermant dans son périmètre huit villages et des milliers de paysans. « Dans ce tableau, la nature est partout ! », précise l’historien. Des champs et des bois en majorité, des pâtures ensuite et quelques forêts enfin, le tout peuplé d’animaux, domestiques et sauvages.

Vie gueulante et glapissante

Alors que Versailles rayonne dans le monde entier par la mise en ordre symbolique de la nature, notamment à travers ses célèbres jardins, se figurer la vie gueulante et glapissante de ce territoire est une gageure. « Le visiter, c’est faire un pas de côté. Le château devient un détail et cela change la perspective : la séparation entre nature et culture, c’est n’importe quoi ! », argue Grégory Quenet.

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