Fashion Week de Milan: à la veille de ses 100 ans, Fendi «molto moderna»

Attention, il y a du changement à la Fashion Week de Milan, qui commence cette saison, un jour plus tôt. À savoir le mardi, avec en ouverture, le défilé Fendi organisé, non pas dans son traditionnel teatro de Via Solari, mais dans un hangar à l’écart de la ville. Comme si la maison avait peur de s’embourgeoiser à la veille de son siècle d’existence. Cette maison romaine fondée en 1925 et «portée» par plusieurs générations de femmes visionnaires et iconoclastes comme en témoigne la bande-son du défilé (conçue par l’incontournable Max Richter). «Una donna molto moderna per i suoi tempi. Molto, molto, molto moderna. Con un gusto molto preciso.» («Une femme très moderne pour son temps. Très, très , très moderne. Avec un goût très précis», en version française) dit dans un enregistrement la voix grave et racée d’Anna Fendi à sa fille Silvia Venturini Fendi, aujourd’hui directrice artistique des accessoires et de la ligne masculine. Une formule que cette dernière pourrait tout aussi bien dire à sa fille, Delfina Delettrez Fendi, en charge des bijoux de la maison… 

Dans cette équation éminemment féminine, il y a toujours eu des hommes: . Edoardo, le patriarche et cofondateur; Karl Lagerfeld, qui a dessiné les collections durant 54 ans; et aujourd’hui, le Britannique Kim Jones, auteur de ce très beau défilé pour l’été 2025. «Cette collection sera la première en boutique pour le centenaire, explique-t-il en coulisses quelques minutes avant le show. J’ai donc voulu transposer 1925 en 2025, modifier les proportions d’une flapper dress à la Mrs Dalloway pour qu’elle se porte tel un tee-shirt d’aujourd’hui. Des années 1920, ce qui m’intéresse, c’est l’écriture moderniste du mouvement Art déco. Et puis, bien sûr la famille Fendi. Je me suis inspirée de chacune de ses femmes, Adele, la fondatrice, et Anna, Silvia, Delfina, Leonetta (fille cadette de Silvia, NDLR)… Certains looks sont des références directes à leurs manières de s’habiller, de s’approprier le vêtement. 1925, c’est aussi une date charnière pour les mouvements d’émancipation féminine dans le monde. Mon seul objectif est de célébrer les femmes, à travers celles de la famille, parce qu’elles sont fortes, qu’elles ont créé cet empire gigantesque. Ce sont des personnes extraordinaires. » 

À lire aussiDans quel(s) sac(s) investir en cette rentrée ?

Alors que continuent les voix de la mère et la fille (rendant hommage à la première de la lignée, Adele, qui «a eu le courage d’ouvrir sa propre entreprise, une belle boutique juste à côté de la Piazza Venezia et cette autre petite sur Via del Plebiscito à Rome»), le casting de mannequins au visage nu, cheveux à peine coiffés et port altier, s’avance en robe de gaze brodée de microperles Art déco. Aux pieds, des godillots de garçons créés en collaboration avec le fabricant américain de chaussures de chantier Red Wing. Les tissus sont légers et souvent transparents. Les fleurs et arabesques de paillettes feraient presque oublier le métier historique de Fendi, fourreur, s’il n’y avait tout de même un vison rasé brun et un manteau peignoir en peau lainé gris perle, favori d’Anna. 

Le travail du cuir aussi est remarquable. De petits pardessus impeccablement taillés viennent réchauffer des polos et shorts en maille beige. Le sac Baguette emblématique inventé par Silvia en 1997, prend des airs de coussin aussi moelleux que luxueux, en cuir, python, mille-feuille de mesh… «Pour moi, poursuit Kim Jones, Londres, c’est la mode masculine, Paris, c’est la couture et Milan, c’est le prêt-à-porter. Je travaille dans toutes ces villes et elles m’apportent toutes des idées et des inspirations différentes. Mais quand je suis à Rome, c’est autre chose, une cité à part, peuplée de gens si élégants.» Et Fendi n’y est pas pour rien depuis 100 ans…