Dengue : des moustiques-tigres infectés par la maladie détectés pour la première fois en France métropolitaine

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« Fouiller les poubelles peut être extrêmement utile pour nous aider à remonter la piste d’une épidémie. » Qui aurait imaginé que le docteur Vincent Raquin, spécialiste des infections virales et des pathologies, milite pour une pratique aussi éloignée des standards de laboratoires. C’est pourtant en analysant le contenu de « poubelles à moustiques » que le chercheur et ses collègues de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) viennent de détecter pour la première fois en France des moustiques-tigres infectés par le virus de la dengue.

Celle que l’on appelle aussi « la grippe tropicale » est la principale maladie virale liée aux moustiques et il n’existe pas de traitement spécifique pour la soigner. La découverte des chercheurs français est le résultat d’une longue investigation aux faux airs d’enquête de police scientifique. Tout est parti de cas de dengue détectés dans la Drôme en 2023.

« Il nous fallait remonter la piste du patient zéro »

« Le foyer comprenait trois cas, dont deux autochtones confirmés, c’est-à-dire que les malades n’avaient pas voyagé au cours des quinze derniers jours dans une zone où la maladie est présente et avaient donc été contaminés sur le territoire français », explique l’Inrae. Pour savoir comment ces deux personnes ont été contaminées, les chercheurs ont donc remonté la piste des insectes qui auraient pu les piquer et leur transmettre la dengue.

« En analysant le contenu de pièges à moustiques situés à moins de 100 m de la zone de résidence des personnes infectées, nous avons retrouvé des moustiques Aedes albopictus (moustique-tigre) qui contenaient le virus », explique Vincent Raquin, entomologiste médical à l’université Claude Bernard de Lyon. Les données génétiques du virus provenant des moustiques collectés ont permis de relier cette souche virale aux souches responsables de l’épidémie de dengue de 2023-2024 ayant sévi dans les îles françaises des Caraïbes. »

Mais comment des populations locales de moustiques-tigres ont-elles pu transmettre un virus circulant aux Antilles, de l’autre côté de l’Atlantique ? Sachant en outre que les moustiques résistent rarement aux voyages en avion et que la Drôme est un département éloigné des grands ports de commerce où il peut arriver que des insectes contaminés arrivent dans l’Hexagone en provenance de zones tropicales.

« Chaque cas humain autochtone de dengue ayant systématiquement pour origine un cas importé, il nous fallait remonter la piste du patient zéro », explique le chercheur de l’Inrae. En menant leur enquête, les scientifiques découvrent que le voisin des deux personnes infectées localement était revenu un peu patraque quelques semaines plus tôt d’un voyage dans les Caraïbes avec des « symptômes compatibles avec la dengue ». Mais un mauvais diagnostic, suite à une téléconsultation médicale, n’avait pas permis de le diagnostiquer.

Le virus circule via des moustiques locaux

C’est donc probablement en piquant ce voyageur déjà infecté qu’un maringouin implanté localement dans la Drôme a ensuite transmis le virus à ses voisins. « On a ainsi bouclé la boucle et pu démontrer que le virus de la dengue circule en France métropolitaine via les populations locales de moustiques-tigres », résume le docteur Raquin.

Ces résultats sont d’autant plus importants pour les autorités sanitaires que le nombre de patients « autochtones » atteints de la dengue augmente en France depuis la découverte des premiers cas à Nice en 2018. « Pour la seule année 2022, 65 cas autochtones ont été identifiés et la limite latitudinale des clusters de dengue observés sur le territoire métropolitain s’est déplacée vers le nord, d’abord vers la région Auvergne-Rhône-Alpes en 2019 puis vers l’Île-de-France en 2023 », souligne l’Inrae.

« Scruter les poubelles à moustiques des particuliers vivant à proximité des lieux où des cas autochtones de la maladie ont été signalés serait un protocole routinier très efficace à mettre en place pour retracer l’épidémiologie du virus », estime Vincent Raquin. Et éteindre plus rapidement dans l’œuf une contagion naissante.

Alors que le moustique-tigre est désormais présent dans 78 départements métropolitains, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) estimait vendredi dans un rapport que la France métropolitaine était exposée à un « risque assez élevé » d’épidémies liées à cette espèce dans les cinq prochaines années. « En cas d’épidémie, les moyens de prévention et de contrôle pourraient être rapidement saturés », prévient l’Anses.



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