«De Rokhaya Diallo à Mediapart, quand la gauche se met à compter les groupes ethniques»

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FIGAROVOX/TRIBUNE – Sur BFM TV, la militante Rokhaya Diallo a estimé qu’il n’y avait «pas assez de personnes non-blanches» sur la première photo de groupe du Nouveau Front populaire. Pour le chroniqueur et consultant Michaël Sadoun, cette séquence, scandaleuse, est symptomatique de la métamorphose de la gauche.

Michaël Sadoun est chroniqueur et consultant.


La question du «racisme anti-blanc» fait partie des thèmes dont la simple mention fait débat. Qu’une personne de couleur blanche puisse être raciste et soumise à des préjugés raciaux, cela va sans dire ; qu’elle soit également victime de préjugés de la part des autres, avec les conséquences (discriminations, violences, insultes) que cela peut impliquer est étrangement beaucoup plus suspect. Pourtant l’actualité n’a pas cessé de nous rappeler que ce racisme anti-blanc s’étendait et pouvait faire des dégâts – on pense notamment au drame de Crépol, avant lequel neuf témoins avaient rapporté avoir entendu les agresseurs de Thomas parler de «planter des Blancs».

Une nouvelle démonstration de ce mal contemporain nous a été offerte lors de la venue de Manuel Bompard sur BFM TV ce lundi 8 juillet. Interpellé sur la composition ethnique – puisque c’est bien comme cela qu’il faut malheureusement l’appeler dans ces débats – de la «photo de famille» du Nouveau Front populaire à l’Assemblée nationale, Rokhaya Diallo interpelle l’Insoumis : «Quand on regarde la photo de famille (…) on ne peut pas dire que les personnes des quartiers populaires soient visibles et pourtant c’est elles qui se mobilisent systématiquement pour LFI ou pour le NFP». Elle complète son intervention en déclarant que la photo l’avait «un peu éblouie», faisant là référence à la blancheur de la peau des représentants de la gauche.

L’avocat Charles Consigny présent en plateau n’a pu se retenir de dénoncer spontanément le racisme d’une déclaration qui pourrait selon lui être condamné par la justice, sous les moqueries d’une Rokhaya Diallo à moitié honteuse et préférant railler bruyamment la révolte de l’avocat en l’associant à des «pleurs» – une référence non dissimulée à la notion woke de «white tears», sanglot de l’homme blanc ne pouvant supporter qu’on l’accuse de tous les maux du monde sans broncher.

La séquence n’a l’air de rien : elle est pourtant symptomatique de la métamorphose de la gauche, qui adopte désormais une grille de lecture racialiste de la société. Et d’un certain nombre de dangers qui nous guettent.

En effet la fâcheuse tendance à comptabiliser les groupes ethniques dans chaque assemblée, corps de métier ou représentation s’est aujourd’hui généralisée, malgré l’incompatibilité de la République avec cette vision communautariste axant la société sur des appartenances religieuses, ethniques ou sexuelles. On ne manquera pas de noter que par l’effet d’un «deux poids deux mesures» tout aussi habituel, les seules victimes de cette mauvaise comptabilité sont les catégories considérées comme «dominantes» par une certain gauche (les hommes, les blancs, les chrétiens, les juifs). À l’inverse, une déclaration pointant du doigt la surreprésentation de personnes issues de la diversité dans un corps de métier ou une assemblée susciterait à juste titre l’indignation générale (ce fut le cas lorsque Éric Zemmour avait trouvé «curieuse» la composition de l’équipe française de football en 2022).

 

En République, il faut croire à l’idée qu’on peut tisser une fraternité plus forte par des idées et par un projet que par un simple taux de mélanine.

Michaël Sadoun

Emboîtant le pas à Rokhaya Diallo, Mediapart a publié un graphique indiquant combien chaque parti siégeant à l’Assemblée nationale comptait de «député issu de la diversité» (quelle «diversité» est prise en compte ?) et de «députés ultramarins racisés» (comme s’ils ne comptaient pas vraiment dans la «diversité»).

Cette vision qui éclate indéfiniment la communauté nationale est à l’inverse de ce qu’on appelle commodément les «valeurs de la République» : elle juge les personnes selon leur appartenance plutôt que sur leur mérite ; elle désigne un homme pour ce qu’il est et non pour ce qu’il fait.

Elle repose en plus sur l’idée qu’on est toujours mieux représentés par une personne de son groupe ethnique que par une communauté d’idées. Un blanc de gauche n’est-il pourtant pas mieux représenté par le noir de gauche que par un blanc de droite ? En République, il faut croire à l’idée qu’on peut tisser une fraternité plus forte par des idées et par un projet que par un simple taux de mélanine.

Cette grille de lecture racialiste des institutions ou de l’ascenseur social nourrit un ressentiment croissant chez beaucoup de Français, et notamment chez les jeunes, qui pour certains perçoivent la République française comme la perpétuation d’un privilège blanc ou pire comme la vitrine reluisante d’un «racisme d’État», que dénonce inlassablement Rokhaya Diallo depuis des années, nourrissant la méfiance vis-à-vis de l’école, de la police, de la justice ou de la représentation nationale.

 

On s’est trop habitués en France à diffuser l’idée fallacieuse selon laquelle nous vivrions dans un cadre social fabriqué pour la réussite des « blancs » et défavorable aux autres.

Michaël Sadoun

Ce ressentiment croissant finit par représenter une menace pour la paix civile et il arrive désormais que l’insécurité ou le développement de la violence s’établisse sur fonds de détestation interraciale. Le meurtre de Thomas à Crépol avait même fait reconnaître à Édouard Philippe, qui est loin d’une droite radicale, la possibilité d’un racisme anti-blanc.

On s’est trop habitués en France à diffuser l’idée fallacieuse selon laquelle nous vivrions dans un cadre social fabriqué pour la réussite des «blancs» et défavorable aux autres. Cette «hiérarchie des races» inversée suscitait pourtant encore le scandale lorsque Dieudonné la propageait dans les années 2000. Le wokisme s’est aujourd’hui emparé de cette manière de concevoir la société, prenant avec tous ses corollaires, dont le plus visible est l’antisémitisme, les juifs étant aujourd’hui perçus comme des «super-blancs» comme le dit Alain Finkielkraut.

Il ne faut plus faire droit à cette idée et battre en brèche les tentatives d’instaurer ici la «discrimination positive», qui n’est rien d’autre qu’une discrimination dirigée vers ceux dont la gauche a décidé qu’ils étaient des privilégiés.

La réaction de Charles Consigny sur BFM TV résume assez bien le mélange de consternation et de révolte que la majorité de ce pays ressent vis-à-vis de cette comptabilité étrange qui ne mérite rien d’autre que l’ignorance ou le mépris.

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