« Chroniques de New York » : Edith Wharton épingle la haute société

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« Chroniques de New York. Romans, nouvelles », d’Edith Wharton, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Marc Chénetier, Sarah Fosse, Claire Malroux et Suzanne V. Mayoux, édité par Emmanuelle Delanoë-Brun et Anne Ullmo, Gallimard, « Quarto », 1 276 p., 36 €.

Aux adultes qui lui demandaient qui elle voudrait être quand elle serait grande, la jeune Edith Wharton (1862-1937) répondait : « La femme la mieux habillée de New York. » Elle le fut. Chaque année, une malle remplie de ­robes lui était expédiée de Paris. L’Américaine portait des chapeaux extravagants, collectionnait les demeures somptueuses et adorait poser sur les photos avec ses chiens de race.

Pourtant, derrière cette apparente superficialité fortunée se cachait un esprit rare. L’écrivain français Paul Bourget (1852-1935), qui la rencontra en 1893 – elle avait 30 ans –, en fut le premier ébloui : « Quoiqu’elle s’habille chez les premiers faiseurs de la rue de la Paix (…), il n’y a pas un livre de Darwin, de Huxley, de Spencer ou de Taine qu’elle n’ait lu, pas un peintre, pas un sculpteur (…), pas une école de poètes ou de romanciers dont elle ne sache les théories » – une soif de culture « à rendre honteux tous les gens de lettres parisiens ». Ajoutez à cela un don d’observation, une finesse et une liberté de plume hors pair, et vous comprendrez pourquoi cette grande amie d’Henry James (1843-1916) fut l’une des écrivaines les plus marquantes de son époque.

Avec Chroniques de New York, elle ­entre aujourd’hui dans la collection « Quarto » : l’occasion de redécouvrir certains de ses grands romans, tels L’Age de l’innocence (1920, prix Pulitzer ; Plon, 1921 ; adapté par Martin Scorsese en 1993) ou Les Beaux Mariages (1913 ; ­Robert Laffont, 1964), et les nouvelles de Vieux New York (1924 ; Flammarion, 1989), dans une édition enrichie de deux dossiers, l’un sur Wharton et le cinéma, l’autre sur l’histoire de New York, jusqu’à la fin de ce qu’on appelle le Gilded Age (« l’âge doré »), cette période de prospérité qui s’étend de la fin de la guerre de Sécession (1865) au début du XXe siècle.

Mais la vraie nouveauté de ce volume est la retraduction, par le grand américaniste Marc Chénetier, du roman The House of Mirth (1905), connu jusqu’à présent en France sous le titre Chez les heureux du monde (Plon, 1908). « The house of mirth » est une expression issue de la Bible du roi Jacques (Ecclésiaste, 7, 4), dont Wharton cite le verset en exergue, et dans lequel le mot rendu en anglais par mirth est traduit en français par « joie », « plaisir » ou encore « liesse », terme retenu par Marc Chénetier : « Le cœur des sages est dans la maison de deuil, et le cœur des insensés dans la maison de liesse. » Il a gardé en titre La Maison de liesse pour désigner New York, cette vaste foire aux vanités où s’ébattent des fous. Sa traduction a les qualités des robes de Wharton : beauté, élégance, fluidité. Et, bien sûr, modernité, car la précédente, signée de l’écrivain et critique Charles Du Bos (1882-1939), datait un peu.

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