Au Sénégal, le président Bassirou Diomaye Faye dissout l’Assemblée nationale et se cherche une majorité

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Le faux suspens a pris fin ce jeudi 12 septembre à 20 heures. Dans une allocution à la télévision nationale, le président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale et convoqué des élections législatives anticipées le 17 novembre. « Je dissous l’Assemblée nationale pour demander au peuple souverain les moyens institutionnels qui me permettront de donner corps à la transformation systémique que je leur ai promise », a-t-il déclaré dans une brève allocution.

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L’annonce de cette dissolution n’est pas une surprise. Fin août, le Conseil constitutionnel avait rappelé que la dissolution de l’Assemblée nationale pourrait être légalement prononcée par le président à partir du 12 septembre, soit deux ans après le début de la quatorzième législature, le 12 septembre 2022.

Faute de majorité au Parlement, toujours dominé par les députés fidèles à l’ex-président Macky Sall, Bassirou Diomaye Faye, élu le 24 mars avec 54 % des suffrages, ne disposait pas de tous les leviers institutionnels pour appliquer son programme de rupture. Son parti, le Pastef (les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) ne comptait que 23 députés sur 165 – et une quarantaine en totalisant ses alliés de la coalition Yewwi Askan Wi.

« Le culte du blocage »

Ces dernières semaines, les divergences entre le pouvoir et l’opposition ont bloqué l’action gouvernementale. Fin juin, les députés de Benno Bokk Yakaar (BBY), la coalition qui soutenait Macky Sall, avaient ainsi boycotté le débat d’orientation budgétaire, provoquant son annulation. La semaine dernière, la proposition de supprimer le Haut Conseil des collectivités territoriales (HCCT) et le Conseil économique, social et environnemental (Cese), jugés « budgétivores » par les autorités, a été rejetée en bloc par les députés de l’opposition. « Le gage d’une collaboration franche avec la majorité parlementaire était une illusion, celle-ci ayant décidé d’entretenir le culte du blocage », a fustigé le président dans son discours.

Ousmane Sonko, premier ministre et leader du Pastef, a pour sa part essuyé plusieurs menaces de motion de censure, dont une a été déposée par le camp de l’ancien régime. Sa déclaration de politique générale (DPG), qu’il était censé prononcer ce vendredi 13 septembre devant l’Assemblée nationale, a été automatiquement révoquée par la dissolution. Un timing qui interroge au sein de l’opposition.

Si les députés gardent leur statut jusqu’aux prochaines élections législatives, ils ne peuvent toutefois plus se réunir, ni en session ordinaire, ni en session extraordinaire. « L’annonce de cette dissolution le 12 septembre, à la veille de la DPG d’Ousmane Sonko, n’est pas un hasard. C’est une manœuvre pour empêcher une motion de censure et sauver le premier ministre », analyse Alassane Ndao, enseignant-chercheur à l’université Gaston-Berger de Saint-Louis. « Cette dissolution est une bonne chose. Nous avons près de 80 projets de lois déjà rédigés qui n’attendent qu’une nouvelle Assemblée pour pouvoir être votés », répond un député du Pastef sortant. Encore faudra-t-il, pour le président et son parti, remporter ces législatives afin d’obtenir, comme ils l’espèrent, une majorité qualifiée.

« Une course contre la montre »

« C’est vital pour le Pastef, poursuit Alassane Ndao. S’ils ne gagnent pas la majorité, la suite du mandat risque de se compliquer. Une bonne partie de leurs promesses sont basées sur des réformes constitutionnelles qui nécessitent l’approbation des trois cinquièmes de l’Assemblée nationale, soit 99 députés. »

« Une course contre la montre s’engage mais nous sommes prêts », assure Ibrahima Diallo, chargé de communication au Pastef. Selon plusieurs sources consultées par Le Monde, le premier ministre (et président du parti), Ousmane Sonko, devrait être investi tête de liste au niveau national – il existe également des listes départementales – et être très impliqué dans la campagne. En guise de prélude, il s’est rendu le 7 septembre à Matam, dans le nord du pays, bastion historique de Macky Sall, pour y promettre une transformation de la région en futur pôle économique.

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Malgré une victoire écrasante dès le premier tour lors de l’élection présidentielle, en mars, le Pastef devrait néanmoins présenter des listes de coalition. « Le scrutin législatif sénégalais est très particulier, mêlant système proportionnel et majoritaire, explique Moussa Diaw, professeur émérite de sciences politiques. Les partis sont obligés de former des coalitions s’ils veulent une majorité tangible. »

De son côté, l’opposition paraît affaiblie depuis la dernière présidentielle. Le 3 septembre, l’ancien président Macky Sall a annoncé la dissolution de la coalition BBY, qui l’avait porté au pouvoir en 2012 et soutenu durant ses deux mandats. Son ancien premier ministre et candidat malheureux à la présidentielle, Amadou Ba, a, lui, créé son propre parti il y a 72 heures. « Ils ne sont pas préparés et se cherchent encore un leader alors que les élections sont imminentes », observe Moussa Diaw.

« La coalition BBY doit être réinventée et élargie à d’autres forces politiques et citoyennes », estime Adji Mergane Kanouté, vice-présidente du groupe parlementaire dissous BBY, ajoutant que le nouveau parti d’Amadou Ba ne sera pas exclu. « Nous sommes toujours en discussion. Nous devons tout faire pour avoir une majorité, pour gagner, ou à défaut imposer une cohabitation », conclut-elle.

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