Au procès des viols de Mazan, le principal accusé Dominique Pelicot sera absent jusqu’à lundi, son état de santé s’étant « aggravé »

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Le procès de Dominique Pelicot, l’accusé principal au procès des viols de Mazan, continue d’être fortement perturbé. Le principal accusé, malade depuis plusieurs jours, ne pourra comparaître devant la cour criminelle de Vaucluse à Avignon qu’« au mieux » lundi, son état de santé s’étant « aggravé », a annoncé le président de la cour, Roger Arata, mercredi 11 septembre.

« Il est dans l’incapacité de comparaître jeudi et vendredi. Je pense qu’il sera hospitalisé, pris en charge sur place. On ne pourra pas avoir M. Pelicot au mieux avant lundi », a affirmé M. Arata.

Mercredi, le procès des viols de Mazan a commencé à aborder individuellement les cinquante et un accusés. L’audience s’est tenue en l’absence du principal d’entre eux, dispensé d’audience pour le troisième jour de suite. Le septuagénaire, accusé d’avoir drogué celle qui est désormais son ancienne épouse, pour ensuite la violer et la faire violer par des dizaines d’inconnus recrutés sur Internet, était arrivé dans la matinée, dans son box, aidé de sa canne, parce qu’il souffre de la hanche, vêtu d’une veste grise à manches longues. M. Pelicot est apparu visiblement affaibli, les traits du visage très tirés et se tenant la tête entre les mains.

« J’ordonne une expertise, je vais signer l’ordonnance dans la matinée et (…) je dispense M. Pelicot pour la journée », avait annoncé le magistrat en ouvrant le huitième jour d’audience de ce procès hors norme, après avoir recueilli l’accord des parties civiles ainsi que du ministère public.

« J’ai rencontré M. Pelicot ce matin. Il était allongé en train de dormir dans les geôles. Il avait vomi, fait un malaise, avec des douleurs dans les reins. Physiquement, il est là, mais je ne suis pas certaine qu’il puisse suivre les débats de manière sereine », a déclaré son avocate, Béatrice Zavarro, en début d’audience, avant que son client soit autorisé par le président de la cour criminelle du Vaucluse à quitter le box des détenus.

« C’est indispensable que M. Pelicot soit en état de comparaître », a confirmé l’un des avocats des parties civiles, MStéphane Babonneau, devant la famille de la victime principale, Gisèle Pelicot, 71 ans, vêtue d’un pull beige et d’un pantalon à motifs zébrés.

Durant la matinée, la cour criminelle du Vaucluse s’est penchée sur le cas de Jean-Pierre M., possible « disciple » de M. Pelicot et seul accusé poursuivi, non pas pour viol sur l’épouse du principal accusé, mais sur sa propre femme.

L’homme de 63 ans, ancien chauffeur routier dans une coopérative agricole, est accusé d’avoir reproduit le même protocole que M. Pelicot en droguant sa compagne avec un anxiolytique afin de la violer, en compagnie plusieurs fois de M. Pelicot. Les faits auraient eu lieu à douze reprises entre 2015 et 2020. « Je reconnais les faits », avait sobrement rapporté Jean-Pierre M., l’un des dix-huit accusés détenus – trente-deux autres comparaissent libres, et le 51e est en fuite –, le 2 septembre, à l’ouverture du procès.

« Mériter la prison à vie »

L’audience a débuté par la lecture du rapport de l’enquêteur de personnalité par le président, puis les témoignages de ses deux enfants. Jean-Pierre M. « dit mériter la prison à vie, comme Dominique Pelicot », avait aussi précisé M. Gal. Devant les enquêteurs ou le magistrat instructeur, Jean-Pierre M. avait expliqué avoir rencontré M. Pelicot sur le salon A son insu du site Internet Coco, fermé en juin dernier. Et « sur les douze faits, c’est sur la demande de Jean-Pierre M. que Pelicot est venu », avait précisé M. Gal.

« Chaque fois qu’il se déplaçait, [ce dernier] lui fournissait les médicaments pour la prochaine fois », avait rapporté M. Gal, corrigé par MZavarro, avocate de l’accusé principal, qui affirme qu’il n’y aurait eu que « quatre remises de médicaments ».

Mercredi, le président de la cour, Roger Arata, a d’abord fait lecture de l’histoire familiale compliquée de Jean-Pierre M., marquée par une enfance dans une grande pauvreté et un contexte de violences intrafamiliales, y compris sur le plan sexuel.

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« J’ai été élevé par les cochons, dans les bois », expliquait-il à ses enfants, restant cependant très discret sur les détails de sa vie au sein d’une fratrie de dix, dans une ferme. Les enfants étaient battus, « attachés nus à des arbres pendant toute la nuit », et le père « organisait des partouzes devant ses enfants », a souligné son avocat, MPatrick Gontard.

« Les faits, ils sont très graves, je pense qu’il en a conscience », a déclaré à la barre son fils de 32 ans, né d’un premier mariage. « Mais ce procès, ça va être un soulagement, je l’encourage à se livrer », a-t-il poursuivi, concédant qu’il est « très difficile à comprendre » que sa belle-mère, la deuxième femme de son père, la victime, n’ait pas porté plainte et ne se soit pas portée partie civile. Selon son fils, « c’est une certitude », Jean-Pierre M. a été manipulé par Dominique Pelicot : « J’ai l’intime conviction que s’il n’avait pas rencontré cette personne, il n’y aurait jamais eu ça. »

« C’était quelqu’un de merveilleux »

Celle qui est toujours son épouse, Cilia M., a livré devant la cour un témoignage émouvant mercredi, disant avoir été « anéantie » par la révélation des faits à l’hiver 2021 et affirmant qu’elle ne lui « pardonnerait jamais ».

« C’est inconcevable qu’il ait fait ça. C’était quelqu’un de merveilleux. Il nous a anéantis. J’attends la vérité, qu’il dise pourquoi il est tombé là-dedans. Pourquoi il a fait ça. On s’entendait bien. Il n’y avait pas de disputes. Il n’y avait rien. C’est incompréhensible », a expliqué cette femme menue qui, par attachement voire « pitié » pour son mari, ne s’est pas portée partie civile.

« Je veux préserver mes enfants au maximum. Ils ont assez morflé. Et ils aiment leur père. C’était quelqu’un de gentil, de formidable. Et bien sûr que je ne peux pas tout oublier. C’est le père de mes cinq enfants. Je n’ai jamais eu à dire quelque chose sur mon mari avant ça », a-t-elle déclaré, en larmes. Lors des faits, à plusieurs reprises, la compagne de Jean-Pierre M. s’était réveillée, son mari lui ayant administré une dose d’anxiolytique trop faible, craignant pour sa santé.

« Je me réveille en sursaut, je vois un homme debout contre la fenêtre, avec une lampe qui clignote et mon mari à côté de moi. J’ai pas le temps de me lever que le monsieur est sorti. Je lui cours après, je demande à mon mari ce qu’il se passe. Il dit que c’est pour voir mes sous-vêtements, et après il se prend dans ses mensonges (…) J’étais habillée, rien ne laissait penser ce qui s’est passé », a-t-elle expliqué mercredi.

Sans pathologie grave, Jean-Pierre M. aurait concrétisé ses fantasmes d’échangisme et de candaulisme (le fait d’être excité en voyant son partenaire avoir des rapports sexuels avec d’autres) « grâce à la rencontre avec Pelicot », a précisé un expert psychiatre mercredi. L’interrogatoire de Jean-Pierre M., prévu jeudi, pourrait ne pas se tenir en raison de l’absence pour raison médicale de M. Pelicot, qui ferait son retour au mieux lundi.

Après Jean-Pierre M., la cour a ensuite entendu une enquêtrice de personnalité évoquer les cas de Cyrille D., 54 ans, et de Jacques C., 72 ans, tous deux accusés d’avoir violé Mme Pelicot, à une reprise chacun. Des faits qui avaient eu lieu au domicile même du couple Pelicot, à Mazan, cette commune de 6 000 habitants du Vaucluse, où ils avaient déménagé en mars 2013.

Ces deux hommes ont également pour points communs d’avoir vécu des enfances marquées par les violences familiales, avant des vies d’adultes présentées par leurs proches comme « normales », s’investissant dans leur travail, leur foyer, avec des vies sociales plutôt riches.

Dans les prochains jours, ces deux hommes, ainsi que Lionel R., 44 ans, autre coaccusé devant répondre de viol sur Mme Pelicot, devraient être interrogés sur ce qui les a poussés à accepter les propositions de son mari, sans jamais avoir apparemment réagi à l’absence totale de réaction de leur victime. Comme ses cinquante coaccusés, poursuivis pour la plupart pour viols aggravés, Dominique Pelicot risque vingt ans de réclusion criminelle.

Rectificatif du 11 septembre à 16 h 30 : Jean-Pierre M. doit être entendu à la barre jeudi 12 septembre.

Le Monde avec AFP

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