Alessandro Michele : «Je veux faire revivre ‘le chic fou’ de Valentino dans la rue»

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Pour son retour sur les podiums, le designer superstar a fait sensation. Rencontre.

Son retour sur les podiums était très attendu. C’est chose faite ce dimanche après-midi à la porte de Châtillon avec son premier défilé Valentino. Pour rappel, Alessandro Michele est entré dans la lumière chez Gucci en 2015 et a fait de la maison italienne un phénomène ultra-lucratif de pop culture durant sept ans. Est-ce l’usure du pouvoir ou l’infernal cycle de la mode? Son esthétique maximaliste avait fini par lasser, les ventes s’essouffler. Le Romain avait quitté brutalement la marque et s’était arrêté 18 mois avant d’annoncer qu’il prenait les rênes créatives de Valentino. Comment se réinventer? Et surtout comment habiter cette maison de couture profondément marquée par l’histoire de ses fondateurs (Valentino Garavani et Giancarlo Giammetti) en restant soi-même? Ces questions ont sans doute taraudé le créateur durant sa mise en retrait. Mais – inutile de ménager le suspense – il a trouvé la meilleure des réponses avec cette très belle collection, touchante, riche, singulière, qui à bien des égards reste très fidèle à l’esprit de Valentino. 

Ses amis sont tous venus, Elton John, Harry Styles, Jared Leto, Carla Bruni, mais aussi François-Henri Pinault accompagné de Salma Hayek, qui n’est autre que son ancien employeur chez Kering et qui a, entre-temps, pris une participation auprès du fonds d’investissement qatari propriétaire de Valentino… Les lieux ont des airs de château abandonné où le mobilier est recouvert de draps blancs, le sol est un immense miroir brisé. La grande parade de Michele peut commencer. Les mannequins hommes et femmes semblent presque errer dans ce labyrinthe, sortant d’un bal oublié, avec chapeaux, voilettes, gants de dentelles. C’est à la fois très Michele dans sa relecture du vintage et sa silhouette chargée, et très Valentino dans les robes de cocktail à pois et à volants, dans les gilets gipsy et les petites vestes de couture folk, dans les jupons imprimés cachemire et les sublimes gilets brodés aux motifs antiques sur velours noir. 

Le défilé printemps-été 2025 de Valentino.
Imaxtree

En regardant ces jeunes gens qui se sont parfaitement approprié les vêtements, on repense à la conversation que nous avions eue avec Alessandro Michele quelques jours avant le show, place Vendôme dans les salons parisiens de Valentino. « J’ai grandi à Rome, M. Valentino faisait littéralement partie de la ville, raconte le designer de presque 52 ans. Tout le monde connaissait sa maison sur la place d’Espagne, tout le monde disait l’avoir croisé, incroyablement élégant, dans tel restaurant ou tel café. Son nom fait partie de la mythologie de Rome! Il était à la ville ce que Prince était à Minneapolis dans les années 1980. Je dis souvent qu’à Rome, il y avait le Pape, le Président et Valentino. Il représentait ce monde inaccessible de divas, d’aristocrates et de têtes couronnées.» Ces derniers mois, il a pris le temps d’explorer les archives «incroyablement riches de robes, de bijoux, de vestes, de chaussures, de turbans, de chapeaux. On peut sentir derrière chaque pièce, le fragment d’une vie, de tant de vies. On peut sentir la personnalité, le corps, l’attitude derrière chaque robe, et c’est sans doute propre à Valentino qui entretenait des relations d’amitié avec nombre de ses clientes! Valentino est le seul couturier italien de l’âge d’or de la couture avant les années 1980. J’aimerais beaucoup ramener dans la rue ce «chic crazy» qui n’existe plus aujourd’hui. Je pense que nous en avons besoin.» 

L’été 2025 de Valentino selon Alessandro Michele.
Johanna Geron / REUTERS

Michele se défend de toute nostalgie. «Mais j’assume d’aimer le passé, pourquoi se priver de la beauté de tout ce qui nous a précédé? J’aime l’idée de ces sédiments de beauté comme à Paris, cette pyramide de cristal devant un bâtiment du XVIIe siècle.» En revanche, il invoque la vitalité folle de Valentino, qui le distingue de la figure du couturier parisien à la Yves Saint Laurent, dépressif et proustien. «J’ai beaucoup regardé les archives mais nous sommes en 2024. Lui-même aurait peut-être fait les mêmes volants, les mêmes brillances, le même chic, mais d’une manière différente. Il aimait célébrer la vie, il célébrerait celle d’aujourd’hui. C’est ce que je veux faire aussi.» Le Romain qui a si bien remixé les codes Gucci il y a presque une décennie, approche l’héritage de Valentino avec plus de subtilité mais sans bouder son plaisir. « Je ne suis pas le genre à copier coller les archives, mais en imaginant cette collection, je repensais à certains détails, à certaines obsessions de M. Valentino comme les pois. C’est drôle, d’ailleurs, car jusqu’ici je détestais les pois, et chez Gucci, Davide (Renne, décédé brutalement l’an dernier) avec lequel j’ai longtemps travaillé, essayait tout le temps de me convaincre d’en faire. Et voilà aujourd’hui, je suis obsédé par les pois! C’est comme être au Japon et ne pas manger de sushi. Ce n’est peut-être pas votre plat préféré, mais si vous êtes à Tokyo, vous devez essayer. J’ai essayé les pois et j’ai adoré ça!» 

De Valentino, il dit aussi avoir pris le style personnel, hippie chic des années 1970 pour sa silhouette masculine. Mais comme Karl Lagerfeld qui détestait qu’on lui parle de respect au sujet de Coco Chanel, Michele dit qu’il respecte bien sûr les deux fondateurs comme il respecte son père et sa mère mais n’a aucune envie de leur ressembler. «Tout ce qui m’importe aujourd’hui, c’est d’être sincère. Pour n’avoir aucun regret.»



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