A Montfrin, la vie de châtelain de Jean-René de Fleurieu : « Tout est usé. Il y a des problèmes partout, d’eau et de chauffage »

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A mi-chemin entre Avignon et Nîmes, le château de Montfrin domine le village du même nom, au bout d’une montée bordée d’acanthes et d’amandiers. Chaque hiver, Jean-René de Fleurieu, 73 ans, se calfeutre avec ses chats et une pile de livres dans une pièce bien chauffée de la vieille demeure classée au titre des monuments historiques.

Et, chaque printemps, le maître des lieux – il préfère le mot « gardien » – sort de cette léthargie pour palisser les oliviers et préparer le domaine à l’invasion estivale des amis. « Après la solitude, l’exubérance, le retour à la vie sociale », résume celui qui hébergea il y a vingt ans les trente comédiens de la troupe de théâtre d’Ariane Mnouch­kine, descendue pour le Festival d’Avignon. Dans l’ancienne chapelle, sous un plafond en ogive, la cuisine d’été peut accueillir jusqu’à dix convives, sans compter les deux ânes qui viennent y chercher des écorces de melon.

Lors de notre visite, au temps des cerises, en juin, c’est encore dans l’humble cuisine d’hiver que l’on partage le déjeuner du châtelain : de grosses asperges blanches arrosées de l’huile d’olive du château, des pâtés en croûte du marché de Nîmes et le premier melon de la saison.

Jean-René de Fleurieu, au château de Montfrin, le 17 mai 2024.

Voix douce et barbe de patriarche, Jean-René de Fleurieu débouche un vin maison qu’il a baptisé A nos amours, en hommage au film de Maurice Pialat. Voilà trente ans que ce descendant du clan Servan-Schreiber, autrefois compagnon de route de la créatrice de mode Agnès b., dont il a deux filles, puis producteur de films underground, s’est réinventé en agriculteur dans le château familial. Sur les rives fertiles du Rhône, entre Provence et Languedoc, il cultive aujourd’hui 180 hectares de vignes et 120 d’oliviers, le tout en bio. Son moulin à huile presse environ 2 000 tonnes d’olives par an, ce qui en fait le premier de France.

L’aïeul en fait un modèle de confort moderne

Une lourde porte dans laquelle on tourne une grosse clé. A l’intérieur de la pièce, des trompe-l’œil réalisés au XIXsiècle par des maçons toscans et des enfilades de chambres à coucher, de boudoirs, de salles de bains aux baignoires en fonte émaillée… Presque rien n’a changé depuis l’entre-deux-guerres, quand son grand-père Robert Servan-Schreiber, le cofondateur du quotidien économique Les Echos, s’offre le domaine pour séduire Suzanne Crémieux, une fille de notables juifs de la région destinée à devenir sénatrice du Gard grâce aux voix des pro­testants cévenols.

La salle à manger du château de Montfrin, aux murs couverts de trompe-l’œil réalisés au XIXᵉ siècle. La salle à manger du château de Montfrin, aux murs couverts de trompe-l’œil réalisés au XIXᵉ siècle.
La cuisine d’été, capable d’accueillir jusqu’à dix convives. La cuisine d’été, capable d’accueillir jusqu’à dix convives.

L’aïeul en fait un modèle de confort moderne, l’un des seuls ­châteaux dotés de l’élec­tricité, ainsi que du téléphone et d’un système ­d’intercom. Aujour­d’hui, la maison vieillit « en harmonie » avec son occupant, comme dit ce ­dernier. « Tout est usé. Il y a des problèmes partout, d’eau et de chauffage, mais j’essaye de faire en sorte que toutes les pièces restent habitables. » A cette fin, il prend ses quartiers de ci, de là. « Je viens ­parfois dormir ici, dit-il en poussant la porte d’une belle chambre un peu monacale. Quand les pièces sont habitées, cela se sent. »

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