Il a saut du TGV au terrain vague de Mnihla

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Nous travaillons nuit et jour pour le bien du pays et dans l’intérêt des Tunisiens, nous a répété le président de la République, Kaïs Saïed, chaque fois que l’occasion s’est présentée. Il a même emprunté, lors d’une de ses interventions improvisées, l’image d’une ruche d’abeilles pour décrire le fonctionnement de l’exécutif. Sauf que le résultat de tout ce travail supposé est bien maigre, si l’on s’astreint au taux de croissance réalisé en 2023 de 0,4%. Un taux qui ne semble émouvoir personne d’ailleurs, ni au sein du gouvernement, ni dans le bâtiment de la cité El Khadra estampillé Utica.

Mais certains diront qu’il s’agit là d’un indicateur insuffisant pour évaluer le rendement et le travail du gouvernement et de son patron, le chef de l’Etat. Même si ce gouvernement et ce président ont eu le loisir d’évoluer pratiquement sans aucune opposition politique et avec un Parlement extrêmement coopératif, les défenseurs du régime invoquent des raisons extérieures et conjoncturelles. Soit. Admettons. Mais que dire alors du fait que les grands projets de la Tunisie, y compris ceux insufflés par le président de la République lui-même, soient à l’arrêt ? Où sont les projets de la cité médicale qui devait se faire quelque part dans le gouvernorat de Kairouan, du centre international de calligraphie, du TGV censé lier Bizerte à Ben Guerdane ? Ce ne sont que de doux souvenirs et de belles promesses qui se sont fracassés contre le vrai exercice du pouvoir. De ces mégaprojets d’infrastructure le président de la République est passé à des réalisations bien plus modestes comme le déblaiement d’un terrain vague à Mnihla à la périphérie de Tunis. Même des projets de moindre importance, comme la réhabilitation du stade d’El Menzah, n’avancent pas au rythme souhaité malgré le fait que le président lui-même suive son évolution.

Pour continuer à « travailler » et faire preuve d’activité, Kaïs Saïed s’en est tourné vers les visites-surprises. Il s’agit là d’une méthode assez populaire qui dépeint un président proche du peuple et qui se soucie de son bien-être même dans les plus petits détails. Il a multiplié les visites non annoncées à différentes structures et entreprises publiques. On l’a vu dans les entrepôts de bus à Beb Saâdoun, dans les bureaux de l’Office du commerce, au sein des méandres de la société El Fouladh à Menzel Bourguiba, à la SNCPA à Kasserine et autres.

Pourtant, très peu de choses ont changé depuis ces visites dans ces différentes organisations, hormis l’ouverture de quelques informations judiciaires. Mais en réalité, les entreprises publiques, que le chef de l’Etat considère comme un trésor et un héritage qu’il faut conserver, croulent sous les dettes et s’enfoncent de plus en plus dans la crise. Aucun travail de fond n’a été effectué sur la situation des entreprises publiques et le gouffre financier qu’elles représentent pour l’Etat tunisien. On s’est contenté de fanfaronner avec des slogans creux et vides de sens.

Le président de la République a montré, à travers toutes ces visites, son incapacité à changer les choses et à mettre sa politique en application. On aura beau claironner des slogans et exprimer des intentions, fussent-elles les meilleures, mais si on ne travaille pas derrière, rien ne se fait. Il n’y a pas de « livrable » qui sort du palais de Carthage ni aucune réalisation concrète.

Par la suite, le président de la République a consacré son temps à des sujets de moindre envergure. Voulant sûrement donner l’impression d’un président omniprésent qui est au courant de tout et qui s’occupe de tout, il a fini par se disperser. Ainsi, nous avons vu Kaïs Saïed s’occuper de la réfection de la piscine municipale du Belvédère en chargeant l’armée du projet. Nous l’avons vu arpenter les ruelles de la médina de Tunis pour inspecter l’état de certains bâtiments historiques abritant d’anciennes écoles ou des bibliothèques. Le président est également allé du côté de Carthage pour rendre visite à Dar El Hout (Institut national des sciences et technologies de la mer) et s’enquérir de l’état des infrastructures accusant, comme d’habitude, d’obscurs lobbies de vouloir mettre la main sur cet institut. Tout récemment le chef de l’Etat est allé à la mosquée de la Kasbah pour s’indigner du fait que le chantier n’ait pas été fini alors que ladite mosquée avait été fermée pour travaux depuis 2011.

Le temps du président de la République n’est-il pas trop précieux pour être consacré à des sujets dignes du niveau d’un simple délégué ? Les travaux de restauration d’une mosquée du centre-ville de Tunis méritent-ils l’attention présidentielle ? Il est clair que non. Mais apparemment, c’est la seule manière de parvenir à concrétiser une réalisation sous l’impulsion présidentielle.

En définitive, nous avons l’impression que ça parle beaucoup mais que ça ne travaille pas, à différents niveaux du pouvoir exécutif. Les slogans c’est bien beau, mais leur concrétisation s’est heurtée à la dure réalité économique et sociale. Le président peut continuer à accuser d’obscurs lobbies d’avoir des ambitions diaboliques, il peut aussi continuer à blâmer ceux qui ont gouverné avant lui et leur mettre l’échec patent sur le dos. Mais concrètement, rien n’est réalisé, l’économie est en berne, la Tunisie est isolée et le chômage grimpe sous le mandat de Kaïs Saïed. Les Tunisiens attendent un pouvoir qui parle moins et qui agit plus, qui change les choses et qui allège leur quotidien. Ce n’est apparemment pas pour tout de suite.

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