« Johnny Got His Gun », retour en salles d’un chef-d’œuvre antimilitariste

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Au-delà de son puissant message antiguerre, Johnny Got His Gun (1971), unique long-métrage de l’américain Dalton Trumbo (1905-1976), met en scène un dispositif des plus étranges sur le sort d’un soldat, Johnny, réduit à l’état de créature monstrueuse. Le réalisateur, auteur du roman du même nom – sorti en 1939, à la veille de la seconde guerre mondiale –, nous captive durant près de deux heures autour d’un drap d’hôpital, sous lequel gît un reste de corps.

Johnny est parti au combat avec un certain enthousiasme, lors de la première guerre mondiale, laissant sa petite amie Kareen désespérée. Celle-ci semble avoir déjà deviné les horreurs qui l’attendent sur le front – un flash-back nous restitue quelques moments passés entre les deux amoureux, et au passage nous dévoile l’apparence de Johnny – incarné par Timothy Bottoms.

Le jeune soldat ne va pas tarder à être percuté par un obus et perd la vue, la parole, l’ouïe et l’odorat. Pour le garder en vie, les médecins décident de l’amputer de ses bras et de ses jambes. L’armée ne parvient pas à l’identifier, mais l’homme respire. Le chirurgien en chef décide de le maintenir en vie, comme étude de cas, persuadé qu’il n’a plus de pensées ni d’émotions. Erreur.

Désarroi intérieur

Johnny cogite, et la voix off nous fait entendre son désarroi intérieur. Le jeune homme ne sait pas où il est et n’a pas encore compris qu’il ne lui reste plus qu’un tronc en guise de corps. Le premier mot qui lui vient est « Kareen ». Pourquoi fait-il si noir, son amoureuse aurait-elle éteint la lumière après leur nuit d’amour, la seule qu’il a pu partager avec elle avant son départ au front ? Installé dans une pièce aux volets clos, à l’écart de l’hôpital militaire, Johnny fait l’objet d’une surveillance médicale. Des infirmières se succèdent à son chevet, plus ou moins intriguées et touchées par le sort de cet être que l’on peine à qualifier d’humain. Il y a les mains douces de celle-ci, puis l’attention de cette autre femme en blouse blanche qui entrouvre les volets, rappelant au soldat que le soleil existe encore.

Ce rituel et les quelques soins qui lui sont prodigués sortent Johnny de sa torpeur et réveillent une forme de révolte sourde, créant un suspense au compte-gouttes. Les visions du jeune homme installent l’œuvre dans la démesure et nous clouent à l’image. Une scène hallucinée montre Jésus (Donald Sutherland) en charpentier, fabriquant à la chaîne des croix pour les morts au combat ; plus tard, Johnny se rêve en monstre de foire, tel un freak exhibé par son père qui le sort de la roulotte. Voilà ce que font les pères à leurs garçons, nous dit Dalton Trumbo, ils les envoient sans état d’âme comme de la chair à canon.

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