Suzanne et l’empoisonneur : « Le problème, c’est que je ne veux pas mourir ! »

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La main gauche serre la tige du micro du box, la droite pétrit un petit mouchoir blanc. Olivier Cappelaere parle de Jacqueline, qu’il a « aimée comme [sa] grand-mère. Jamais, jamais, je n’aurais pu lui faire de mal. Etre accusé de l’avoir empoisonnée, c’est une horreur. J’étais le petit-fils qu’elle n’avait pas eu, j’ai rempli une case manquante. » Il écrase quelques larmes dans son mouchoir. Se reprend. « Si effectivement j’ai commis cet acte horrible avec Suzanne Bailly, jamais, je n’aurais pu faire ça avec Jacqueline, jamais ! » Larmes à nouveau. Ce lundi 23 mai 2022, face à la cour et aux jurés des Alpes-Maritimes, à Nice, qui le jugent pour l’empoisonnement de Jacqueline, décédée à 92 ans, Olivier Cappelaere avoue celui de Suzanne comme on se débarrasse d’un fantôme encombrant.

Trois ans plus tôt, dans cette même salle d’audience, le tout juste quinquagénaire avait nié jusqu’au bout avoir tenté de tuer celle dont il avait acheté l’appartement en viager, en versant de l’atropine dans sa bouteille d’eau. Dans les travées du public, une femme et son avocate étaient venues l’écouter. Evelyne Rencurel, la nièce de Jacqueline, est aujourd’hui assise à la place qu’occupait Suzanne, sur le banc des parties civiles. Devant elle, Me Ariane Kabsch, du barreau de Grenoble, a éparpillé sur son pupitre des feuilles volantes griffonnées et des rouleaux de procès-verbaux froissés, retenus par un élastique.

De l’autre côté du prétoire, les deux conseils de l’accusé ont déployé l’entier dossier, rigoureusement classé, étiqueté, organisé en chemises, elles-mêmes divisées en sous-chemises colorées. Exit le pénaliste niçois qui avait défendu Olivier Cappelaere jusque-là. Pour cette nouvelle affaire, dont il espère fermement sortir acquitté, l’accusé a fait appel à deux avocats parisiens du prestigieux cabinet Temime : Me Corinne Dreyfus-Schmidt, silhouette aiguë rehaussée d’escarpins, blazer et pantalon ajustés, chemisier soyeux, brushing souple, lèvres soulignées de rouge, et Me Balthazar Lévy, barbe de trentenaire, corps affûté, regard sombre.

Vue de la fenêtre de la cuisine de Suzanne Bailly, à Belfort, en avril 2024 : « Je suis mieux auprès de mes pommiers », dit-elle.

Olivier Cappelaere a aussi changé de stratégie de défense. Pour expliquer les traces d’atropine retrouvées sur le cadavre exhumé de Jacqueline, plus question d’affirmer que celle-ci, déprimée, avait voulu se suicider. Rien ne collait avec cette thèse dans le dossier. Il soutient désormais que sa « marraine de cœur » a succombé à une surdose de ce produit administré par les médecins lors de son hospitalisation. Une erreur médicale, en quelque sorte, dont on voudrait injustement lui faire porter le chapeau. Ses avocats ont d’ailleurs sollicité à grands frais un contre-expert privé, censé disperser façon puzzle les conclusions accusatrices du toxicologue désigné par la juge d’instruction. Le voilà qui décline ses titres à la barre, « professeur de médecine en pharmacologie, chef de service des hôpitaux de Paris, membre de l’Académie nationale de médecine et de pharmacie », et annonce qu’il va livrer son « expertise ». La présidente interrompt sèchement son envolée : « Vous êtes ici en qualité de témoin et non d’expert. Donc, vous donnez un simple avis. »

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