A Gaza, l’exception culturelle française en sursis

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Jeudi 5 octobre 2023, quarante-huit heures avant la sanglante attaque du Hamas contre l’Etat hébreu. François Tiger, le directeur délégué de l’Institut français de Gaza (IFG), arrive au volant de sa Jeep blindée au terminal d’Erez. La structure fortifiée, grande comme un hall d’aéroport, sert de point de passage entre l’enclave palestinienne et le territoire israélien. Le trentenaire breton s’apprête à regagner le consulat de Jérusalem, son deuxième bureau. Comme la soldate israélienne à qui il tend son passeport, le diplomate français est à mille lieues d’imaginer que le terminal, un lieu truffé de caméras, de casemates blindées et de miradors, sera bientôt dévasté par les assaillants du Hamas.

Ce jour-là, il a juste une pensée pour Rehaf Batniji, une photographe gazaouie qu’il doit revenir chercher à Erez, quatre jours plus tard, afin de la conduire à l’aéroport d’Amman, où l’attend un vol pour Paris. L’ordinateur de Rehaf Batniji, ses disques durs et ses appareils sont déjà dans le véhicule de François Tiger.

La jeune femme est la dernière élue d’un programme de bourses supervisé par l’IFG qui a permis à des dizaines d’artistes palestiniens de passer un an en résidence à la Cité internationale des arts, sur les bords de la Seine, à Paris. Un témoignage de la vitalité de cette institution qui, en juin 2023, pour la Fête de la musique, avait organisé un concert de rock, applaudi par cinq cents personnes, au Centre culturel orthodoxe de Gaza. Le 9 octobre, cela aurait dû être le tour de Rehaf Batniji de quitter l’enclave. Mais la photographe n’a jamais pu rejoindre Erez. Après le massacre du Hamas, fatal à mille deux cents Israéliens, en majorité civils, et l’enlèvement de deux cent cinquante-deux personnes, une montagne de bombes s’est abattue sur le confetti de terre palestinien.

L’actuel bâtiment de l’Institut français de Gaza, endommagé par un bombardement, en mai 2024.

Au nom de l’éradication du Mouvement de résistance islamique, la bande de Gaza a été pilonnée : quartier après quartier, école après école, hôpital après hôpital. Un broyage méthodique jalonné d’un nombre incalculable de victimes. Début juillet 2024, les autorités de santé de Gaza dénombraient plus de trente-neuf mille morts, en grande majorité civils, sans compter les milliers de personnes disparues sous les décombres.

Le 3 novembre, l’élégant bâtiment de couleur sable qui abrite l’IFG, cheville ouvrière de la politique culturelle tricolore à Gaza, a échappé de peu à l’anéantissement : une bombe ou un missile israélien a explosé à proximité. Le mur d’enceinte est endommagé, mais le corps principal est à peu près intact. « On ne peut pas aller sur place, donc on n’a que des éléments indirects, mais, a priori, le bâtiment n’est pas à reconstruire », dit Nicolas Kassianides, le consul de France à Jérusalem, chargé des territoires palestiniens.

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